•  C'est les vacances : j'en profite pour voir mes amies ! Aujourd'hui, j'ai prévu une sortie avec Brigitte, rencontrée en tant qu'institutrice spécialisée quand j'avais le petit Louis dans ma classe. Cette enseignante en Braille est maintenant devenue enseignante référente, c'est à dire qu'elle coordonne tout ce qui concerne les enfants handicapés sur la circonscription et... elle a besoin d'un bon bol d'air, son métier lui plaisant beaucoup mais requérant quelques 60 heures de travail par semaine !

     Avec elle, je visite aujourd'hui l'exposition "Trompe-l'oeil" au Musée des Arts décoratifs : une très belle architecture pour ce musée situé au 107 rue de Rivoli donc dans les locaux du Louvre.

     Panorama_musee_des_arts_decoratifs.jpg

     Le trompe-l'oeil date de l'antiquité : les fresques et les mosaïques ornant les riches maisons patriciennes cherchant souvent à immiter la nature.

     Le récit le plus ancien qui marque les débuts du trompe-l'oeil est celui de Pline l'ancien dans son "Histoire naturelle", ouvrage en... 37 volumes qui nous est parvenu.

     "Zeuxis eut pour contemporains et pour émules Timanthès, Androcyde, Eupompe, et Parrhasius. Ce dernier, dit-on, offrit le combat à Zeuxis. Celui-ci apporta des raisins peints avec tant de vérité, que des oiseaux vinrent les becqueter; l’autre apporta un rideau si naturellement représenté, que Zeuxis, tout fier de la sentence des oiseaux, demande qu’on tirât enfin le rideau pour faire voir le tableau. Alors, reconnaissant son illusion, il s’avoua vaincu avec une franchise modeste, attendu que lui n’avait trompé que des oiseaux, mais que Parrhasius avait trompé un artiste, qui était Zeuxis."

     Zeuxis regardant les oiseaux picorer ses raisins...

      anonyme-Zeuxis-et-les-raisins.jpg

     Gravure de 1650 représentant le duel de Zeuxis et de Parrhasius

     Duel-de-Zeuxis-et-Parrhasius---gravure-aninyme-de-1613-Amst.jpg

     L'exposition présente en douze petites salles quelques 400 objets destinés, comme son nom l'indique, à "tromper l'oeil". Chacune d'entre elles porte un intitulé (pas toujours très clair...) et regroupe des objets ayant un point commun (parfois difficile à déceler).

     La salle "A la manière de" présente des objets faisant référence aux techniques du passé comme cette coupe sur pied en verre soufflé, émaillé et doré d'après un modèle de Henry-Joseph Brocard (1884) à la manière moyen-orientale du XIVème siècle.

     Coupe-sur-pied-de-Philippe-Joseph-Brocard-1884.jpg

     La salle "Ca trompe énormément" présente des objets ne livrant pas tous leurs secrets au premier regard comme ce "tabouret d'aisance" . C'est sur cette "selle" qu'on faisait s'asseoir les accusés pour les interroger d'où l'expression "mettre sur la sellette"... Plus directement, l'expression "aller à la selle" se réfère également à ce type de siège en forme de livre pouvant contenir comme on dit toutes les commodités !

     Tabouret d'aisance en bois doré et cuir (vers 1770)

     Tabouret-d-aisance-Bois-et-cuir--1770-.jpg

     Un autre objet très curieux que j'ai découvert ici : les "pots trompeurs".

     Le pot trompeur appelé aussi pichet trompeur, pot à surprise ou pot à illusion, est connu de longue date et est très apprécié des collectionneurs. Il est ajouré dans sa partie supérieure, faisant penser qu'il est impossible de le vider... mais sous son anse se cache un petit orifice qu'il faut boucher pour pouvoir boire au goulot en aspirant le liquide circulant dans l'anse creuse et le bourrelet du rebord...

     Pots trompeurs en verre soufflé de Bohême (XVIIIème siècle)

    et en faïence de Nevers (après 1650)

     Pots trompeurs Nevers 1650

     La salle "Copie conforme" présente des pièces en tous points identiques aux originaux comme ce masque d'homme barbu dit d'Agamemnon en cuivre doré datant de 1894 strictement identique au masque en or du Trésor de Mycènes du Musée d'Athènes.

     Masque d'Agamemnon 1894

     La salle "Une matière peut en cacher une autre" présente des objets imitant à la perfection un matériau (le marbre, le jaspe, le cuir et... même la peinture - sous la forme de velours !)

     Ici deux oeuvres ën faïence émaillée de Pol Chambost : un service "Coquillage" (vers 1955) et un service à orangeade imitant à s'y tromper le cuir.

     Service à orangeade Sellier Faïence émaillée XXème

     La salle "Faire comme si" expose des échantillons de vénilia, linoléum et formica  imitant des matériaux plus coûteux tels que le bois, le métal, le carrelage ou le marbre...

     Ici une lithographie issue d'un album de la Compagnie rouennaise de linoléums.

    Lithographie en couleur de l'Album Compagnie rouennaise de

     On peut aussi y admirer un vase assez extraordinaire dont les anses sont constituées d'herbes fleuries "pétrifiées" par l'adjonction d'une résine puis soumises à l'action de la lumière fixatrice : il s'agit de la technique contemporaine appelée "UV top coat" (vous savez, les faux ongles). Wieki Somers et Dylan Van den Berg, les créateurs de ce vase ont pris modèle sur des photographies de branches d'arbres, de cordes à linge, de réverbères etc... pendant une période de grand froid).

     On n'imite jamais mieux le naturel qu'avec la nature elle-même !

     Vase-Big-Frozen-de-Wiedi-Somers-et-Dylan-Van-den-Berg--2010.jpg

     Dans la salle "Les 2D sont pipées" se trouve une superbe armoire surréaliste de Marcel Jean (1941). Le meuble lui même est fort simple, il n'a d'intérêt que la peinture qui en recouvre les portes : une série de faux vanteaux et de faux tiroirs ouvrant sur un paysage. Avouez que l'illusion de la 3D est parfaite !

     

    Armoire surréaliste de Marcel Jean (1941)

     La salle "Cousu de fil blanc"

     On y voit une photographie de Gunnar Larsen intitulée "Homme assis à une terrasse de café" (1973). Torse nu mais... tout habillé !

     Photographie Homme assis à une terrasse de café 1973

    La salle "Faux cul" regroupe une collection de sous-vêtements féminins allant du vertugadin (bourrelet que les femmes portaient autrefois pour faire bouffer leur robe) à la tournure (coussin garni de crin fixé sous la robe par une ruban entourant la taille) en passant par le panier, la crinoline ou la cage !

     Une tournure du XIXème siècle en toile de coton et métal

     Tournure Toile de coton et métal fin XIXème.crdownloa

     Dans la salle "Ombres et lumières", on peut voir divers décors imitant la pierre destinés à des portes ou à des plafonds telle cette composition de l'italien Cherubino Alberti (XVIème siècle)

    Composition-decorative-pour-un-plafond-italien--XVIeme-.jpg

    ou encore ce collier "Pavés" de Claude et Françoise Chavent (2000) en argent brossé et or simulant parfaitement l'impression de relief.

     Collier-Paves-de-Claude-et-Francoise-Chavent-en-argent-br.jpg

    La salle suivante s'intitule "Ceci n'est pas une period room".

     Vous me direz, avec ça on est bien avancé ! Qu'est-ce donc qu'une "period room" ? Bon, ce qui est sûr c'est que c'est un mot anglais... What else ? A force de chercher je trouve ! "Une period room (en français on dit : ensemble) présente, dans un musée des Arts décoratifs, un décor composé d’éléments authentiques qui tente d’évoquer un espace intérieur censé illustrer une époque précise, dans une culture donnée."

    Avec ça on se sent plus savant, non ?

    Je pense qu'ici, en l'occurence, on y a mis n'importe quoi mais... vous n'êtes pas obligés de me croire : tiens tiens cela me rappelle la chronique matinale et quotidienne d'un certain Jean-Pierre Gauffre sur France Info... : voilà que je fais du plagiat maintenant !

     On y trouve donc un cartel porte-montre de 1700 en carton à imitation d'écaille,

     Cartel porte montreFrance 1700 Carton imitation écaille

    un fauteuil au dossier en papier mâché avec incrustations de nacre et peinture dorée,

     Fauteuil-gondole-Jennens-et-Bettridge--vers-1860-pg.jpg

    et une série de papiers peints en trompe-l'oeil bien sûr... Pas mal, celui-là !

     Papier peint Manufacture Desfossé et Karth fin XIXème

    L'avant-dernière salle porte le nom de "Au naturel". On peut y admirer, entre autres, une collection assez extraordinaire de "bibis", tous d'inspiration florale.

    Celui-ci s'intitule "Hortensia et glycine" : plus vrai que nature !

    Chapeau hortensia

     Et la dernière salle me direz-vous ? Et bien elle porte encore un nom savant : "Optique hypnotique" mais quand je vais vous dire qu'elle regroupe divers appareils destinés à créer l'illusion, vous aurez tout compris.

     Voici le praxinoscope-théâtre d'Emile Raynaud ( 1879)

     Praxinoscope -Théâtre Emile Raynaud Paris 1879

    Praxinoscope-a-projection-de-M.-Reynaud.jpg

    Une autre illusion d'optique : l'anamorphose d'Europe d'Elias Baeck (1740) détruit à première vue l'image pour la reconstituer sur un support cylindrique...

     Anamorphose L'Europe 1740 de Don James Hyde 1940

     La visite est très amusante car elle est vraiment variée : j'y ai passé, en bonne compagnie, un excellent moment. L'expo dure jusqu'en novembre 2013 : vous aurez donc tout loisir d'y aller si je vous en ai donné l'envie...

    Le site du Musée des Arts décoratifs est extrêmement bien fait ; je m'en suis beaucoup inspirée pour écrire ces petites notes.

    J'oubliais de vous dire que la vue sur Paris depuis le 9ème étage du Musée est tout simplement magique ! Ce jour-là, la tour Eiffel avait les pieds dans la brûme : on se serait cru revenus à l'époque de sa construction. Dommage que je n'aie pas eu d'appareil photo (une grossière erreur de ma part)...


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  •  Vous l'avez sûrement remarqué : le printemps est arrivé à Paris. Regardez mes beaux géraniums qui ont résisté aux froidures de ces dernières semaines grâce aux soins que je leur ai prodigués... Cela donne bien envie de se ballader ! 

    Bon, je pense qu'il faut rester prudent au niveau de la météo... car l'hiver n'est sûrement pas fini mais aujourd'hui, soleil aidant, il faisait bon dans les rues de la capitale.

     Balcon-17-02-2012.jpg

     Direction donc l'Hôtel de Ville où se tient jusqu'à la fin du mois de mars l'exposition Sempé qui attire les foules à juste titre. Un bon trois quarts d'heure d'attente et... nous voici à pied d'oeuvre.

     L'exposition qui a débuté fin octobre et qui devait initialement se terminer le 11 février a été prolongée, vu le succès qu'elle remporte auprès des parisiens et des provinciaux en vacances et...

     c'est un vrai bonheur !

     Des originaux du dessinateur humoristique : en veux-tu en voilà ! Plus de 300 dessins sont exposés très harmonieusement dans la grande salle que nous connaissons maintenant parfaitement pour y être déjà venus à de multiples reprises : il faut dire que la Mairie de Paris y organise régulièrement deux grandes expositions par an et ceci... pour la modique somme de "0" euro ! Eh oui, c'est gratuit et on en profite.

     Les-salons-de-hotel-de-ville.gif

     Jean-Jacques Sempé est né à Bordeaux en 1932 et à 17 ans il publie déjà ses premiers dessins sous le pseudonyme de "Dro" (de "draw" : dessiner en anglais !).

     Par la suite, sa rencontre avec René Goscinny le conduit à créer le personnage du "Petit Nicolas". Mais, ce serait se tromper grossièrement que réduire le dessinateur à ces petits croquis mettant en scène un garçonnet dans un environnement urbain des années 50 qui, il faut bien le dire, ont eu un énorme succès le conduisant à réaliser différents albums ayant pour héros ce personnage. Un film en sera même tiré en 2009...

     En effet, l'exposition nous montre Sempé sous les traits d'un véritable peintre : il utilise toutes sortes de techniques allant du simple (mais complexe) coup de mine de plomb (il utilise aussi la plume avec de l'encre de chine) en noir et blanc à la couleur qu'il obtient par l'utilisation de crayons, de pastels et même de l'aquarelle.

     Sempé porte un regard attendri sur le monde, ne caricaturant jamais les personnages qu'il dessine patiemment, jour après jour : pas moins d'une semaine pour concevoir un dessin et une autre pour le réaliser, pratiquement toujours à la perfection (quelques rares retouches par collages montrent la difficulté de son art qui ne permet pas l'erreur...).

     Retouches.jpg

     Ses sujets d'inspiration, il les trouve à Paris en arpentant les rues à vélo ou... en autobus à plateforme. Il a d'ailleurs la nostalgie de ce type d'autobus dans lesquels : "l'on attrapait des rhûmes terribles mais ça faisait partie de la vie de Paris et ça me plaisait."

     Le vélo donnera "Raoul Taburin" : un marchand de vélo qui ne sait pas pédaler !

     Raoul-Taburin.jpg

     Les autobus à plateforme, il les voit volontiers dans le tohu-bohu des embouteillages parisiens et saisit alors l'oportunité de "croquer" la colère des voyageurs quand ce ne sont pas les voyageurs qui forment l'embouteillage !

     Sempe-autobus-a-plateforme.jpg

    Sempé accompagne volontiers ses dessins de bulles humoristiques, comme dans la série "L'ascension sociale de Monsieur Lambert" qui a pour cadre la brasserie Chez Picard.

      L-ascension-sociale-de-M.-Lambert.jpg

     Les conversations des convives de Chez Picard :

    la politique bien sûr mais évidemment aussi le foot et les femmes...

     sempe-lambert-copie-1.jpg

     Ses thèmes préférés : Paris, le monde de l'enfance, celui de la musique (le jazz surtout), du sport, la psychanalyse, la vie de couple, la hantise de l'américanisation etc etc.

     et... New York

     L'exposition se termine d'ailleurs par les dessins originaux que Sempé a réalisés pour les couvertures du "New Yorker" (plus d'une centaine pour ce mensuel américain.) Les couvertures du magazine sont présentées en regard de leurs originaux et la règle de jeu du magazine est de présenter un dessin... sans légende.

     Voici la première couverture que Sempé a réalisée pour The New Yorker en 1978.

     1978-08-14-TNY-Sempe-first.jpg

     En voici une autre très célèbre

     sempe-tny.jpg

     Je vous avais dit qu'il y avait de la couleur dans les dessins de Sempé...

     Sempe-The-New-Yorker-4.jpg

     La vidéo par les commissaires de l'exposition

      

    L'exposition dure jusqu'à fin mars.

    Si vous voulez un bon conseil, allez-y en fin de journée.

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  •   Nous sommes allés hier à "L'Adresse" boulevard de Vaugirard, autrement dit au Musée de la Poste :  il s'y passe toujours des expositions très bien documentées et c'était le cas pour celle-ci s'intéressant aux sorcières. Son titre : Sorcières, mythes et réalités.

     L'affiche de l'exposition représente une huile sur toile de Louis Maurice Boutet intitulée "La leçon avant le Sabbat" qui date de 1882 et provient du musée de Nemours. On appelait sabbat les assemblées que les sorciers tenaient la nuit sous la présidence du Diable pour célébrer les rites les plus mystérieux de leur art infernal, rendre hommage à leur maître et se livrer entre eux à tous les emportements de leurs passions.

    Sorcières - Affiche expo

    L’imaginaire de la sorcellerie 

     Dans cette première partie, les visiteurs découvriront des toiles, dont  La leçon avant le sabbat (affiche de l’expo) de Louis Maurice Boutet de Monvel ou Macbeth et les sorcières de Jules-Alexandre Duval, ainsi que des affiches de films – Les sorcières de Salem, Ma femme est une sorcière, la Beauté du Diable

     Les toiles

     Les trois socières de Jean-Claude Aujame (avant 1957)

    Sorcieres---Les-3-sorcieres-de-Jean-Claude-Aujame.gif

     Macbeth et les sorcières de Jules Alexandre Duval (1855)

     Macbeth-et-les-socieres-de-Jules-Alexandre-Duval.jpg

    Les affiches de films

    Sorcières - Affiches de cinéma

    Sorcieres---les-sorcieres-de-salem.jpg

    L'espace historique

     Gravures et papiers anciens sur les affaires de possession diabolique dans les couvents à Loudun en 1632, à Louviers au milieu du XVIIe siècle, témoignent de sordides condamnations de prêtres désignés par les moniales comme étant à l’origine de leur trouble.

     L’espace historique dévoilera 18 tableaux exécutés en 1938 par José de la Pena racontant les procès en sorcellerie menés en 1609 dans le Pays basque.

     La convocation au Sabbat de José de la Pena (1938)

    Sorcières - la convocation au sabbat José de la Pena 1938

     La dame de Martiabalsarena danse de José de la Pena (1938)

    Sorcières - la dame de Martiabalsarena danse José de la P

    Les pratiques magiques 

    Dans la seconde partie, l’essentiel des objets exposés provient des collections d’ethnographes. On y retrouvera reliquaires, talismans, amulettes, grimoires... Dans une vitrine, des animaux empaillés: chat noir, pie, rat blanc, blaireau, corbeau et chouette. En Vendée, ceux qui voulaient faire un pacte avec le Malin faisaient bouillir vivant le pauvre animal dans une marmite!

    Pour terminer, le visiteur se rend chez Madame P, envoûteuse qui vivait au début du XIXe siècle dans la Creuse, à côté du Berry. Elle avait fait fabriquer par le potier de la région des figures de diable qui sont exposées ici.

     Des herbes douées de pouvoirs magiques...

    Sorcières - Bocaux d'herbes vénéneuses

     Poupée d'envoûtement (fin 19ème siècle)

    Sorcières - dagyde - poupée d'envoûtement fin XIXèmes s

     Diverses représentations du Diable

    Sorcières - Diverses représentations du diable

     Pour une critique de l'exposition, lisez l' article de Anne-Sophie Lesage : ici


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