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Par Tolbiac204 le 13 Juin 2023 à 23:00
Vous me direz : c'est quoi les Filles du Roy ?
Pour le savoir, il faut se tenir informé de l'histoire de la Nouvelle France à l'époque de Louis XIV sachant que La Nouvelle-France était un ensemble de territoires coloniaux français d'Amérique septentrionale, ayant existé entre 1534 (date de son exploration par Jacques Cartier) et 1763, avec le statut de Vice-Royauté de France, et dont la capitale était Québec.
Carte de la Nouvelle-France au XVIIe siècle dédiée à Colbert
La Nouvelle-France du XVIIe siècle, sous le règne de Louis XIV, se consacre surtout à des activités en lien avec le commerce de fourrures. Avec seulement 6,3 % de femmes, la population est principalement composée d’hommes (officiers et soldats en fin de contrat ayant décidé de rester en Nouvelle-France), et l'écart entre les sexes ne fait que se creuser. En échange d’un monopole sur la traite des fourrures, une politique d’augmentation de la démographie est mise en place à court terme. L’objectif est de rétablir la parité entre les sexes en l’espace de 15 ans en faisant venir des femmes de France.
Les Filles du Roy sont des jeunes femmes envoyées en Nouvelle-France sous la tutelle du roi Louis XIV et sous la direction de Colbert, entre 1663 et 1673, pour s'y marier, y fonder un foyer et établir une famille afin de coloniser le territoire.
Romain Belleau, fondateur de la Société d'Histoire des Filles du Roy du Québec, va nous parler dans son exposé des Filles du Roy dont il est l'un des descendants tandis que Maud Sirois-Belle , Présidente de la Société d'Histoire et d'Archéologie du XIIe, fait une petite introduction.
Tous les deux ne peuvent pas cacher l'émotion qui les étreint en évoquant leurs ancêtres Filles du Roy.
Maud Sirois-Belle nous parle tout d'abord d'un livre que je vais probablement me procurer "Le premier jardin" d'Anne Hébert, une québécoise, livre dans lequel l'auteur dit : "Il faudrait les nommer toutes à haute voix".
770 jeunes femmes ont ainsi été envoyées en Nouvelle-France entre 1663 et 1673 dont 240 qui sont parties de la Salpêtrière. D'autres sont parties de Rouen (plaque sur les murs de l'hôpital Charles Nicolle), de Dieppe (plaque sur les murs du château) ou encore de La Rochelle (plaque sur le mur du Couvent de la Providence).
Sophie Moisan, qui est peintre, a représenté les premières Filles du Roy parties coloniser la Nouvelle-France en 1663 avec leur costume de l'époque. C'est le même costume qui est porté par leurs descendantes à l'occasion des nombreuses fêtes commémoratives au Québec.
Mais aujourd'hui, en 2023, c'est le 350ème anniversaire du dernier départ de France des Filles du Roy qui est commémoré.
Romain Belleau qui a beaucoup travaillé sur le sujet nous dit qu'elles étaient 27 dans sa généalogie (de 15 à 36 ans), filles ou veuves, et qu'elles ont présumément bénéficié de l'aide royale pour ce qui est de leur voyage et de leur établissement en Nouvelle France.
L'aide royale servait à payer leur mariage, leur nourriture et leur logement avant qu'elles ne se marient (entre leur arrivée à Québec et leur mariage, les Filles du Roy étaient placées sous la protection de religieuses, de veuves ou de familles. Elles y étaient logées et nourries). L'aide royale représentait 50 livres canadiennes en sus des biens propres qu'elles emportaient et dont le montant est estimé en moyenne à 300 livres.
Les Filles du Roy se mariaient en moyenne 4 mois après leur arrivée (elles étaient très attendues par la gente masculine). Les hommes, de leur côté, étaient privés de la traite et de la chasse s'ils ne se mariaient pas dans les quinze jours suivant l'arrivée des bateaux...
D'après mon ami internet, les hommes pratiquaient la traite des fourrures avec les autochtones (qui connaissaient mieux qu'eux les territoires de chasse) contre des marchandises provenant de France mais ils pouvaient aussi chasser par eux-mêmes.
Certains mariages se font ainsi à la chaîne, certains mariés servant de témoins à un autre couple.
Côté fécondité, il apparait que les Filles du Roy étaient plus fécondes (en moyenne 9,1 enfants) que les françaises de métropole (en moyenne 6,5 enfants).
Cela s'explique sans doute par des critères de sélection très stricts : les Filles du Roy devaient être plutôt agréables à regarder, en tout cas pas des laideronnes, avoir des dons pour les travaux manuels et une santé solide (elles doivent en effet résister à l'épreuve du voyage qui dure plusieurs mois et à celle du climat de la Nouvelle France, en particulier s'adapter au rythme des saisons). Il leur faut aussi avoir une bonne santé pour participer au travail de la terre.
Romain Belleau nous a aussi parlé de l'historien Yves Landry qui a écrit un livre intitulé "Les Filles du Roy au XVIIe siècle".
Voici une vidéo où Yves Landry parle des Filles du Roy.
Romain Belleau a aussi évoqué la condition juridique des Filles du Roy en Nouvelle France nous parlant de "La coutume de Paris" mais je n'ai pas bien compris ce qu'il a dit. J'ai trouvé sur le net ceci à ce propos :
La Coutume de Paris est un code français qui régit les droits civils des individus, leur statut, leur régime matrimonial ainsi que la propriété et la transmission de leurs biens. Cet ensemble de lois est appliqué officiellement en Nouvelle-France à partir de 1664.
En vertu de la Coutume de Paris, la femme est soumise à son père tant qu’elle est mineure et ne peut se marier, se lancer en affaires ou signer un contrat sans son consentement. Une fois mariée, la femme demeure inapte juridiquement et doit s’en remettre à son mari pour la gestion de leurs biens. Les seules femmes qui détiennent une autonomie juridique sont les femmes adultes non mariées, qu’elles soient veuves ou célibataires.
En 1663, on recensait 3.500 habitants en Nouvelle France. Ce chiffre est passé à 11.000 en 1673.
Intéressant !
Qui sait si mon cousin a des Filles du Roy dans sa généalogie ? Il parait que la plupart des québécois en ont...
1 commentaire -
Par Tolbiac204 le 25 Mai 2023 à 23:00
Vous êtes bien installés dans votre fauteuil ?
Oui, alors vous allez pouvoir prendre connaissance
tranquillement
du retour que je viens de faire de la promenade-conférence organisée par la Société d'Histoire et d'Archéologie du XIIIe à laquelle j'ai pu participer.
La SHA a fait appel à Jean-Luc Largier, président de l'Association Sources du Nord Etudes et Préservation (ASNEP), pour faire découvrir à une vingtaine d'adhérents, très privilégiés, les regards servant autrefois à inspecter les canalisations des "Sources du Nord" de Paris alimentant la capitale depuis l'antiquité.
Voici le trajet que nous avons fait dans un quartier que je ne connaissais presque pas.
Le beau temps est au rendez-vous et je rejoins le groupe au métro Télégraphe, au nord-est de Paris.
C'est dans le square Belleville-Télégraphe voisin que nous nous installons sur des bancs en arc de cercle pour écouter notre conférencier qui est venu avec Maxime, un jeune stagiaire.
Jean-Luc Largier nous dit que nous sommes ici au point culminant de la capitale (128,508 mètres au-dessus du niveau moyen des mers). Eh oui, ce n'est pas Montmartre...
Il est venu avec une énorme documentation
et nous parle d'abord des aqueducs de l'époque romaine qui approvisionnaient les villes en eau (certains, aériens, sont restés célèbres comme le Pont du Gard). Il nous dit aussi que, même s'ils sont moins spectaculaires, les systèmes de captation et de distribution d'eau développés au nord de Paris à partir du XIIe siècle ont eux-aussi laissé des monuments remarquables qui sont classés au patrimoine.
Deux réseaux ont été créés à cette époque : les eaux de Belleville (venant du versant sud de la butte de Belleville) et les eaux du Pré-Saint-Gervais à partir des ruissellements du versant nord de la butte de Belleville et des collines du Pré, des Lilas et de Romainville.
La promenade-conférence "Eaux de Belleville", je la ferai au mois de Juin. Pour l'instant, intéressons nous à celle des "Eaux du Pré-Saint-Gervais" : elle m'a donné du fil à retordre mais je pense n'avoir pas trop dit d'âneries...
Ce sont des moines de la léproserie de Saint-Lazare qui, les premiers, au milieu du XIIe siècle, eurent l'idée de creuser des rigoles reliées à un aqueduc pour acheminer l'eau du Pré-Saint-Gervais vers leur monastère du faubourg Saint-Laurent. Rapidement, les rigoles furent couvertes de dalles de pierre. Puis des regards furent édifiés le long des aqueducs.
Ils permettaient de voir si l'eau s'écoulait bien, si elle était propre et s'il n'y avait pas d'incident. Leur entrée était protégée afin d'éviter tout risque de contamination ou d'empoissonnement et préserver la qualité de l'eau. Ils permettaient aussi de vérifier les débits et de surveiller les conduites qui alimentaient les fontaines publiques.
Sur le plan, l'emplacement du monastère du faubourg Saint-Laurent
Les eaux du Pré-Saint-Gervais sont un ensemble de rigoles acheminant les suintements du sol sablonneux de la colline vers des bassins, puis vers un aqueduc central permettant le transport de l'eau vers Paris, en contrebas.
Ci-dessous, le schéma de la construction d'un aqueduc et de son enfouissement
Le parcours du réseau est jalonné de regards permettant de contrôler la qualité des eaux. Sur les 21 regards de ce réseau du Pré-Saint-Gervais il ne subsiste que quatre regards classés et bien conservés :
☻ le regard des Maussins
☻ le regard du Bernage
☻ le regard de la prise des eaux du Pré-Saint-Gervais
☻ et le regard du Trou Morin
Ce sont ces quatre regards que nous allons aller voir.
La photo d'une carte postale datant du début du XXe siècle montre des moutons paissant dans un champ : ici, c'était il y a un peu plus d'un siècle l'allure qu'avait "le Pré" comme l'appellent actuellement ses habitants.
D'ailleurs, sur ce plan, on voit très bien que Paris était réduit à une portion congrue. Ni la butte Montmartre ni le plateau de Belleville n'en font encore partie. Il faudra attendre la construction dans les années 1850 de l'enceinte de Thiers pour voir Le Pré-Saint-Gervais et Les Lilas arriver aux portes de Paris.
Sortis du square Belleville-Télégraphe, nous empruntons la rue de Belleville et notre guide en profite pour nous parler de l'autre circuit des eaux, celui des eaux usées, en nous faisant remarquer cette plaque située au numéro 268 où il est inscrit "Maison salubre - Tout-à-l'égout", chose qui autrefois était assez rare.
La deuxième concerne la plantation actuelle par la Mairie d'innombrables arbres dans Paris (il faut faire plaisir aux écolos). Très bien pour l'écologie mais pas formidable pour les canalisations souterraines qui trinquent dit-on si l'on sait qu'un arbre possède autant de hauteur de racines qu'il a de hauteur de branches.
A cet emplacement de la rue de Belleville se trouve une sous-station de la RATP (un poste de redressement) mais autrefois c'était une halte d'omnibus.
Vous voulez savoir pourquoi ?
Et bien, à la fin du XIXe siècle, se trouvait là un lac, le Lac Saint-Fargeau, où l'on pouvait canoter, faire de la balançoire ou du toboggan : en fait, ce lac avait été créé sur une ancienne carrière de sable.
Incroyable mais vrai !
Il fallait bien un moyen de transport pour conduire les parisiens ici le week-end car il s'y était installé une sorte de guiguette, le Cabaret du Lac Saint-Fargeau. Son propriétaire de l'époque obtiendra de la Compagnie Générale des Omnibus (CGO, l'ancêtre de la RATP) que la ligne d'omnibus N soit prolongée et que son nouveau terminus soit dénommé "Lac de Saint-Fargeau".
La campagne à Paris...
Nous voici arrivés au boulevard Serrurier (sur les Maréchaux) au coin duquel se trouve le premier regard que nous allons visiter, le regard des Maussins. D'après notre guide, si je ne me trompe, l'origine de ce nom proviendrait - peut-être - de "mort-saint" en rapport avec la résurrection de Saint-Lazare.
Ce regard a été déplacé en 1963 à 350 mètres au sud-est de son emplacement primitif lors de la réalisation du réservoir des Lilas.
Sur cette photo, on voit le creusement du réservoir des Lilas et à droite la position initiale du regard des Maussins.
Au loin, l'église Notre-Dame de Fatima que nous verrons plus tard.
Voici l'emplacement actuel du regard des Maussins.
Une plaque gravée sur le côté du regard indique : "Ouvrage construit au Moyen-Age et reconstruit à la fin du XVIIe siècle pour recevoir les eaux de source du Pré-Saint-Gervais".
La lampe-tempête (ou lampe à souder peut-être ?) a été allumée.
On va pouvoir commencer la visite !
L'intérêt de la lampe
Imaginez que nous voilà à l'intérieur d'un ouvrage construit au XIIe siècle (rénové au XVIIe) !
Le regard est aéré en haut par une toute petite ouverture dans la voûte.La deuxième aération est celle qui provient de la porte d'entrée.
Voici les trois rigoles qui alimentent le bassin.
Et à droite, le trou d'évacuation des eaux conduisant celles-ci jusqu'au prochain regard.
Jean-Luc Largier nous fait remarquer une plaque sur le mur du fond correspondant à une ancienne inscription ayant été martelée à la révolution pour faire disparaître toute trace de la royauté.
Vue sur le réservoir des Lilas depuis les Archives nationales
Au loin l'église Notre-Dame-de-Fatima que nous allons rejoindre.
L’église Notre-Dame-de-Fatima a été construite à la suite d’un vœu : en 1944, le cardinal Suhard promet de faire élever une église à la Mère de Dieu si la Vierge sauve Paris de la destruction par les Allemands. Cette église, bâtie entre 1951 et 1954 par l’architecte Henri Vidal, sera consacrée à Notre-Dame Médiatrice de toutes Grâces.
D’après le plan d’urbanisme, un quartier d’habitation devait entourer le sanctuaire. Il ne sera jamais construit. L’église se retouve isolée, séparée de sa paroisse par le périphérique tout proche qui fait fuir les gens. Elle ferme en 1974 et ne rouvre qu’en 1988 avec la construction de l’hôpital Robert-Debré.
A cette occasion, elle est confiée à la communauté portugaise de Paris sous l’appellation «Notre-Dame-de-Fatima-Marie-Médiatrice» par le cardinal Lustiger.Le clocher-campanile domine Paris de ses 58 mètres de haut.
Nous n'aurons pas le temps d'entrer à l'intérieur mais j'ai trouvé cette photo sur internet : elle est d'une grande sobriété. Il faudra que je retourne la visiter.
Nous passons ensuite devant l'Hôpital Robert-Debré (médecin considéré comme le père de la pédiatrie française moderne), hôpital qui fait ainsi fonction d'hôpital pour enfants et pour adultes (il soigne les mères et leurs enfants).
Puis c'est le passage sous le périphérique, construit en 1956 à la limite de la "zone non aedificandi".
Voici à quoi ressemblait la porte du Pré-Saint-Gervais à la fin du XIXe siècle. On peut y apercevoir les anciennes fortifications de Thiers.
Et voici le prochain regard que nous allons visiter, le regard de Bernage, miraculeusement conservé lors de la construction du périphérique.
Ici, Jean-Luc Largier nous présente une photo prise à l'époque de la construction du périphérique.
Vous voyez ce grand immeuble et le fameux regard devant entouré en rouge ?
Et bien, ils sont toujours là de nos jours ! Les propriétaires de la petite maison à gauche de la photo ont dû serrer très fort les fesses à l'époque...
Le regard de Bernage est bien sûr protégé par des grilles dont l'entrée est solidement cadenassée. Comme tous les anciens regards, il a été classé aux Monuments historiques en 1899.
Il est adossé au boulevard périphérique.
Et la nature y a repris ses droits.
Aux angles du regard, des bornes gravées aux armes de la Ville de Paris. J'avoue que je ne les ai pas bien vues sur place.
Cette gravure représente Louis-Basile de Bernage de Saint-Maurice. Je ne me souviens plus très bien mais je suppose qu'on a donné son nom au regard à l'époque où il était prévost des marchands de Paris (l'équivalent de maire) de 1743 à 1757, ce qui date le regard du milieu du XVIIIe siècle. Sous l'ancien régime, le prévôt des marchands devait se charger de la surveillance des aqueducs : il devait les inspecter une fois par an, s'assurer de la propreté des regards et goûter l'eau.
Voyons l'intérieur maintenant.
Un escalier d'époque permet de descendre a niveau des rigoles.
Toujours le même principe
L'eau arrive par une rigole, passe par la cuvette de jaugeage où elle peut être analysée, et part rejoindre le prochain regard.
Avant de quitter cet endroit, Didier (une autre personne de l'association) nous fait visiter "la cabane au fond du jardin".
Dedans, se trouve un vrai trésor archéologique (qui a été déplacé ici je ne me souviens plus pour quelle raison) : il s'agit d'un morceau de l'ancien aqueduc construit à l'époque gallo-romaine pendant le règne de l'empereur Septime Sévère (145-211) pour alimenter Lutèce en eau et qui arrivait, entre autres, au niveau des Thermes de Cluny sur la rive gauche : il a donc près de 2.000 ans.
On rechercha donc logiquement des sources au sud, les eaux de la Seine ou de la Bièvre étant considérées comme de trop mauvaise qualité. Le principal bassin collecteur de ces sources se trouvait à Wissous, il a aujourd'hui disparu. L'aqueduc qui partait de ce bassin en direction de Lutèce était constitué d'une rigole en pierre, enfouie à quelques dizaines de centimètres sous la surface et recouverte de dalles. On estime entre 1.000 et 2.000 m3 la quantité d'eau acheminée quotidiennement.
Le béton romain est célèbre pour sa résistance.
Didier nous montre un schéma représentant la coupe d'un aqueduc.
Plus tard, Marie de Médicis fera reconstruire un aqueduc au même endroit, qui porte son nom, afin d'alimenter en eau son palais du Luxembourg.
Voici le tracé des trois aqueducs successifs qui seront construits ici : l'aqueduc de Lutèce, l'aqueduc Médicis et l'aqueduc de la Vanne. Ils sont construits au point le plus étroit de la vallée de la Bièvre, là où la pente est la plus forte, sur la ligne de pente provenant du plateau de Rungis, riche en sources, et conduisant au sud de Paris.
En route pour le prochain regard situé au Pré-Saint-Gervais cette fois-ci.
Il s'agit du regard de la Prise des Eaux du Pré-Saint-Gervais dont Jean-Luc Largier nous montre ici une carte postale agrandie.
Il se trouve face à l'Hôtel de Ville de la commune.
La municipalité actuelle a eu la bonne idée de créer juste à côté un espace de détente pour ses habitants incluant des jets d'eau et comme il faisait très beau, les enfants en avaient pris possession.
Le regard initial, construit au XIIe siècle, a été remplacé au XVIIe siècle (vers 1640) sous le règne de Louis XIV par l'édifice actuel formé d'un édicule rectangulaire à étage de 4,5 x 3,5 m et de 6 m de haut lorsque l'exploitation des sources a été confiée à la ville de Paris. Une niche surmontée d'une pomme de pin abritait une fontaine destinée à alimenter les habitants en eau. Elle ne fonctionnait pas quand nous sommes passés.
Notre guide nous montre ici l'inscription qui figurait autrefois au-dessus de la pomme de pin et qui a été effacée à la révolution. Vous remarquerez l'écriture ancienne de Louis XIIII.
« Ce regard qui reçoit les eaux de toutes les Sources du Pré Saint-Gervais a esté construit du Règne de Louis XIIII, prévosté de Mre Hierosme Le Feron, président aux enquestes, eschevinage De Mrs Pierre Hachette, conseiller du Roy au Chastelet, Raymond Lescot, conseiller de ville, Claude Boucot, secrétaire du Roy, Simon de Sequeville, bourgeois ; estans Mre Germain Prête Procureur du Roy et de la Ville, Martin le Maire Greffier, Nicolas Boucot, receveur d’icelle. »
Ici, c'est un repère de nivellement en fonte qu'il nous montre : il indique l'altitude du lieu par rapport au niveau de la mer à Marseille.
Nous sommes ici à 70,82 mètres, ce qui signifie que nous sommes descendus de 60 mètres depuis le début de la balade.
La porte d'entrée se trouve sur le côté gauche du regard. A gauche de la photo, on aperçoit les bâtiments de l'Hôpital Robert-Debré situés sur Paris.
Le regard est toujours équipé de sa plomberie ancienne.
A l’intérieur, un répartiteur perfectionné permettait de distribuer l’eau à commencer par celle de la fontaine.
Le regard comprend deux étages.
Toutes les eaux du Pré-Saint-Gervais se réunissaient dans cet édifice avant d'être dirigées vers Paris. Autrefois, une partie des eaux arrivant dans ce regard alimentait les "concessions particulières" de propriétés situées à peu de distance, l'eau restante continuant vers Paris. Suivant l'usage hérité des Romains, chaque concession était desservie par une conduite ayant pour point de départ la cuvette de jauge du regard. Il en était encore ainsi à la fin du XIXe siècle.
Moi, tout ce que j'ai compris c'est que ces petits "lavabos" servaient à redistribuer l'eau à des particuliers (chacun son tuyau) et que ces particuliers étaient souvent des personnes privilégiées car autrefois l'eau était un bien très précieux.
Et le redevient de nos jours !
J'ai aussi compris surtout c'est qu'il fallait faire très attention à équilibrer les poids des 7 visiteurs autorisés à entrer ensemble à l'intérieur pour éviter que le plancher (qui mériterait une petite réfection) ne s'effondre !
L'hôtel de ville est celui où Jaurès faisait ses discours.
Il s'y tient justement une exposition sur le grand homme de gauche mais là n'est pas notre propos. Il nous faut encore aller rejoindre le dernier regard de cette promenade-conférence.
Arrivés au numéro 73-75 de la rue André-Joineau, nous empruntons la "Villa du Pré", un ensemble de ruelles bordées de jolies maisons du XIXe siècle. C'est une ville dans la ville et un exemple du mode de vie de la classe moyenne et « petit-bourgeois » sous Napoléon III. La Villa du Pré compte deux cents pavillons et jardinets. La diversité architecturale, d’implantation, de volume des pavillons et les accès confidentiels du site (porches, escaliers, chemins étroits) lui confère une ambiance particulière très prisée par les Gervaisiens et les Parisiens en ballade.
La Villa du Pré fut bâtie à partir de 1830 sur une propriété agricole, qui appartenait à un certain monsieur Gide (aucune parenté avec l’homme de lettres). Cet entrepreneur parisien comptait y exploiter le sous-sol riche en gypse, mais l’autorisation ne lui avait pas été accordée par la municipalité. C’est alors qu’il décida de diviser sa parcelle en deux cents lots pour y construire de coquettes maisons avec jardin, destinées à des petits-bourgeois séduits par le calme verdoyant de ces environs de Paris que l’écrivain Charles Nodier surnommait « le bas Luxembourg ».
..Ici, les voitures ne passent pas...
Quelle découverte que cette ville du Pré-Saint-Gervais !
Sortant d'un passage, on arrive dans un autre. Ici, il a été mal orthographié : il s'agit en fait du passage du Trou-Morin du nom du regard que nous allons visiter.
Son nom provient du lieu-dit où il a été bâti.
Les eaux drainées sur les versants de Romainville et des Lilas se rassemblaient dans ce regard. Elles étaient ensuite dirigées par l'intermédiaire d'une conduite en plomb vers le regard de la Prise des Eaux du Pré-Saint-Gervais, puis vers Paris.
Le regard du Trou-Morin, dont l'origine remonte vraisemblablement au Moyen-Age, a bénéficié d'une importante restauration en 2005. Il s'y déverse encore aujourd'hui une eau relativement abondante et limpide dirigée vers l'égout de l'avenue Edouard-Vaillant et quand on s'arrête à son niveau, on peut entendre le doux bruit de l'eau.
Ce regard est aujourd'hui en contrebas, cela est en fait dû à la mise en place de remblais au XXème siècle pour la construction des immeubles avoisinants. Il était à l'origine à flan de colline, entouré de vergers.
Effectivement, on trouve en face une barre d'immeubles HLM en briques rouges assez discrète car peu élevée probablement construite au XXe siècle.
Si la porte d'entrée de la grille de l'enclos est protégée par un cadenas, celle du regard l'est, elle, par une serrure munie d'un dispositif "à secret".
Saurez-vous le découvrir... ?
Non non, il faudra me torturer pour que j'avoue ma science, même si elle est toute récente !
Notre conférencier, qui sait plaisanter lui aussi, laisse une personne du groupe essayer, en vain...
...avant de lui dévoiler l'astuce !
En contrebas, les campanules sont heureuses...
A l'intérieur du regard, notre guide nous montre à nouveau une plaque où se trouvait autrefois une inscription concernant la monarchie dont la révolution a fait table rase.
Essai de vidéo
La plus grande partie des eaux recueillies dans ce regard pouvait être jaugée dans un bassin dans lequel était disposée une feuille de métal. Celle-ci, courbée en arc de cercle, et percée de vingt trous d'un pouce de diamètre (environ 25 mm), formait la paroi d'une cuvette de jaugeage. Ce dispositif permettait, grâce à une opération simple, de déterminer le débit journalier au niveau de cette cuvette. Il me semble me souvenir que Jean-Luc Largier nous a expliqué qu'il fallait boucher un certain nombre de trous pour arriver au résultat final mais là j'avoue que je n'ai pas bien suivi.
Tout ce que j'ai retenu c'est que les eaux de captages drainées encore de nos jours par ces regards sont évacuées dans les égouts de Paris et que ça représente tout de même une certaine perte.
Jean-Luc Largier nous montre aussi - mais je n'ai pas pris de photo - des tracés qui ont été faits sur le mur du côté au XVIIe siècle, nous disant qu'il nous en donnerait la raison au prochain regard. Or, sur le papier qu'on nous a distribué au départ, la visite s'arrête là : mystère, mystère...
Nous empruntons ensuite la sente des Cornettes.
Avant d'arriver dans l'avenue Faidherbe (nous sommes maintenant arrivés aux Lilas, commune limitrophe du Pré-Saint-Gervais) où se trouvait autrefois effectivement un autre regard , la Fontaine Saint-Pierre, dans laquelle les habitants du Pré allaient puiser leur eau autrefois.
La voici avant sa démolition
Ici se termine cette promenade-conférence qui était absolument passionnante. Merci à la SHA du XIIIe de nous avoir permis de le suivre moyennant la somme modique de 10 euros.
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Par Tolbiac204 le 16 Mai 2023 à 23:00
Mon amie Madeleine m'a proposé il y a quelques mois trois places pour l'Opéra Bastille. Dommage que Philippe n'ait pas été tenté de m'accompagner : il aurait passé une super soirée.
Il faut dire que le programme était alléchant : un hommage à Maurice Béjart au travers de trois ballets célébrissimes (du moins deux d'entre eux).
Pour aller à la Bastille, j'ai choisi de passer par le port de plaisance de Paris Arsenal. Ils sont nombreux les bateaux qui y sont amarrés !
Le voici côté Bastille
et côté quai de la Rapée
Au programme tout d'abord, l'oiseau de feu sur une musique d'Igor Stravinsky.
Nous étions placées (j'y suis allée avec Arlette et Michèle) très haut dans les gradins et avions ainsi une vue plongeante sur la scène ce qui, dans le cas de ce ballet en particulier, présentait l'avantage de surplomber les figures géométriques créées par Maurice Béjart.
J'ai parfois eu l'impression de regarder au travers d'un kaléidoscope tant la symétrie des figures était parfaite. L'internet m'a permis de retrouver un court extrait de ce ballet qui dure 22 minutes.
Regardez : c'est magnifique.
Après un premier entracte de 20 minutes, nous avons été bercées par la musique de Gustav Mahler grâce au "Chant du compagnon errant" magistralement exécuté par deux danseurs étoiles seuls en scène pendant 20 minutes, Germain Louvet et Marc Moreau (ce dernier a été nommé danseur étoile en mars 2023).
Dans ce ballet, il s'agit d'un "pas de deux pour hommes" avec un "danseur rouge" qui représente la mort (Marc Moreau) et un "danseur bleu" (Germain Louvet).
Maurice Béjart, le chorégraphe disait qu'il s'agissait "d’un compagnon errant comme ces jeunes apprentis du Moyen-Age qui allaient de ville en ville à la recherche de leur destinée, de leur maître".
Interview de Marc Moreau et de Guillaume Diop (autre danseur étoile qui danse en alternance avec Germain Louvet)
Après un deuxième entracte de 20 minutes qui m'a permis de retrouver Madeleine et de voir le coucher du soleil,
nous avons pu voir et entendre le fameux Boléro de Ravel interprété ce 16 mai par une danseuse, Sabrina Mallem, maîtresse de ballet associée à la Direction de la Danse à l'Opéra de Paris.
Mon Boléro, disait Ravel, devrait porter en exergue "Enfoncez-vous bien cela dans la tête". C'est vrai que pendant les 16 minutes du morceau, la musique revient inlassablement, un temps pendant lequel la danseuse effectue systématiquement le même pas de danse, les seules variations provenant du mouvement de son corps qu'elle accompagne de celui de ses bras.
Maurice Béjart confie le rôle central, soit à une danseuse comme ce soir, soit à un danseur, le rythme étant interprété par le groupe de danseurs qui l'entourent.
A la sortie du ballet, une petite photo (prise à la va vite) du ciel, particulièrement beau hier soir.
Une soirée magique
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Par Tolbiac204 le 3 Mai 2023 à 23:00
Nous avons eu l'occasion pendant que nous étions en Bourgogne d'aller faire un tour à la Galerie d'art de Châtillon où exposent en ce moment deux artistes.
Verena DeGiorgis est d'origine suisse mais vit en France depuis 1961. Après l'école des Arts et Métiers de Berne, elle devient dessinatrice de mode à Dijon. C'est auprès du peintre dijonnais J.C. Ancet qu'elle reprend le pinceau pour s'orienter résolument vers la peinture abstraite.
Pour accompagner son travail, le galériste, Patrick Dupressoir, a choisi de présenter ses peintures à l'huile parmi les œuvres de Tony Babic, un ancien ouvrier du zinc, travailleur en chantier réparant les toitures, devenu, par instinct et idéal, un sculpteur-créateur à l’imagination débordante.
Quelques photos de notre passage
En entrant dans la galerie, on se trouve nez à nez avec un énorme gorille plus vrai que nature qui semble nous défier.
C'est ainsi que nous découvrons l'œuvre très colorée et fouillée de Verena DeGiorgis.
Je ne suis pas une inconditionnelle de l'art abstrait mais j'ai trouvé que ses tableaux étaient très lumineux chacun dans leur genre. Sur la gauche de la photo, "La louve" de Tony Babic.
J'ai beaucoup aimé celui-ci dont le titre est "Feu ravageur". Je crois que je lui donne le prix d'excellence !
A côté, le cerf de Tony Babic semble juste échappé de l'incendie...
"La musique en couleur" face à ce bel oiseau de proie
"Apparition"
Il faut être dans la tête de l'artiste pour comprendre le titre de ce tableau fort beau et si minutieusement peint. Moi, j'y vois des feuillages abritant une colombe.
Verena DeGiorgis a aussi peint un quadriptyque "Les quatre saisons".
Voici "L'hiver"
On n'aimerait pas le rencontrer sur son chemin...
Le regard de Tony Babic sur les animaux est toujours très juste.
"Nocturne"
S'agit-il de musique ici... ? En tout cas, si c'est le cas, elle est tourmentée. J'ai appris sur le site du galeriste que Verena DeGiorgis jouait du violon...
De l’humour dans la vitrine avec ce gorille fumant le cigare, chapeau sur la tête
"Les masques"
Une belle découverte que cette galerie dont vous pouvez consulter le site internet en cliquant ICI.
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Par Tolbiac204 le 24 Mars 2023 à 23:00
Hier, je suis allée à la mairie de notre arrondissement écouter une conférence sur le moulin de la Tour à Ivry : elle était donnée par Maud Sirois-Belle, la présidente de la SHA (Société d'Histoire et d'Archéologie) du 13ème arrondissement.
Ce matin, nous sommes allés le visiter tous les deux : Ivry n'est qu'à quelques stations de métro de chez nous.
Avouez qu'on se croirait un peu à la campagne !
Le moulin de la Tour est le dernier moulin existant encore en Val-de-Marne. Son architecture de pierre est typique des moulins parisiens, dont la taille des étages est décroissante. Il s'agit d'un moulin-tour construit en pierre de taille dont le premier propriétaire connu remonte à 1674, sous Louis XIV donc.
Les cerisiers en fleurs forment un joli premier plan à cette photo.
Maud Sirois-Belle nous accueille à 10h au pied du moulin. Il souffle un vent du Nord glacial mais tous les participants ne sont pas encore arrivés et la visite ne commence de toutes façons qu'à 10h30. Au final, nous serons treize à assister à cette visite guidée (les places sont limitées à quinze personnes car l'espace intérieur est étroit).
Le moulin de la Seigneurie d'Ivry apparaît clairement sur la carte des chasses royales de 1730. Il cessera de moudre le grain en 1830, pour stocker des hydrocarbures au siècle suivant (photo ci-dessous de 1960) avant de partir en ruine.
Mais en 1975, face à la menace d'un projet de construction immobilière, le moulin est sauvegardé par l'intervention de Maurice Thorez et la constitution d'une association, l'Association des Amis du Moulin de la Tour.
Voici l'immeuble qui a été construit à son emplacement.
Avouez qu'il a fière allure le moulin de la Tour, même si ses ailes ont été malheureusement rognées il y a deux ans pour cause de pourrissement. Elles devraient descendre jusqu'à la fenêtre du bas mais il faudrait, nous a-t-on dit, 200.000 euros pour les restaurer...
Le président de l'Association des Amis du Moulin de la Tour nous accueille au rez-de-chaussée du moulin où une exposition de photos permet de voir les différentes étapes de sa reconstruction.
Nous avons appris beaucoup de choses sur place en visitant les trois étages en partie grâce aux écrits d'Emile Le Gall, ancien Président de l'Association des Amis du Moulin de la Tour, et aussi aux explications des deux bénévoles présents sur les lieux.
Le moulin de la Tour a été acquis en 1680 par Claude Bosc, Seigneur d'Ivry-sur-Seine et Conseiller du Roy, puis il est passé entre les mains de différents seigneurs qui avaient "droit de ban" sur leurs sujets, avant qu'un meunier, Charles Mortier, n'en fasse lui-même l'acquisition en 1765.
A cette époque on ne comptait pas les moulins en région parisienne : pas moins de 300 sur Paris dont 30 dans le XIIIème arrondissement. Ils ont tourné jusqu'au XIXème siècle, produisant 2 sacs de farine par jour (chaque sac pesant environ 75 kilos) mais la révolution industrielle les a fait disparaître.
Différents animaux sont attachés aux moulins : les ânes, les souris et les araignées.
On voit ici, au rez-de-chaussée, l'anneau qui existait dans tous les moulins pour attacher l'âne qui livrait la farine afin qu'il ne perde pas la tête en voyant tourner les ailes du moulin.
Nous avons aussi appris l'origine de quelques expressions employant le mot "moulin" comme :
► On n'entre pas ici comme dans un moulin !
Il faut savoir que le moulin possède toujours une porte sur le devant et une sur le derrière. C'est une chose que j'ignorais... Quand les ailes ne tournent pas, pas de problème, on y entre par l'une ou par l'autre porte mais quand elles tournent c'est une autre histoire : il faut impérativement passer par la porte de derrière pour ne pas risquer de se prendre un coup d'aile (il n'y a que 2 secondes entre le passage de deux ailes).► Meunier tu dors, ton moulin ton moulin va trop vite : vous connaissez la chanson enfantine.
Quand les ailes tournaient trop vite, il y avait des risques d'explosion dus aux particules de farine ou aux poussières en suspension dans l'air ainsi qu'au fait que les meules contenant du silex pouvaient engendrer des étincelles.◄►◄►◄►◄►◄►
Nous voici maintenant au premier étage du moulin. Nous levons tous la tête pour regarder cette énorme poutre en chêne dont le guide bénévole nous dit qu'elle date de Louis XIV. C'est la seule poutre d'origine du moulin qui, vous le verrez plus bas, a été entièrement restauré au XXème siècle.
A cet étage, deux maquettes de moulins : notre guide nous en explique les différences.
Celui de gauche est un moulin à pivot : c'est le plus ancien, il est en bois et on peut en voir encore en Hollande ou même dans l'est de la France. Sa base, appelée "chandelier" est fixe tandis que la "cage" pivote sur un axe (sur 360°) pour permettre aux ailes de faire face au vent.
Dans celui de droite, un moulin tour (en pierre, similaire à celui dans lequel nous nous trouvons), c'est la toiture (ou coiffe) qui permet de bien orienter les ailes en tournant sur 360°. Dans cette dernière maquette, on voit que la "voilure" des ailes (les toiles) a été réduite pour que le moulin ne tourne pas trop vite !!!
Voici une photo prise sur place qui montre, à droite de l'échelle, les galets sur roulement à bille qui permettent à la coiffe de tourner.
Vous me direz : faire tourner la coiffe du moulin, c'est facile : en réalité, c'est plus facile à dire qu'à faire,
SAUF quand celui-ci est équipé d'une guivre (ou queue) que le meunier va pouvoir actionner depuis le sol (les moulins à pivot ont une petite queue, les moulins tours une grande). Je n'avais jamais réalisé que les moulins avaient une queue !
Il parait qu'il faut 7 à 8 hommes pour le faire (ou alors il peut se servir d'un treuil).
Du côté des ailes, la rue est garnie de jolis cerisiers fleurs.
A cet étage également, des photos et une présentation des différentes céréales.
Nous voici maintenant au dernier étage, l'un des étages les plus importants d'un moulin, celui où est placée la meule que vous voyez en bas de la photo, protégée par un entourage de bois.
Celle-ci est constituée de deux pierres de silex striées dont l'une, celle du bas, est fixe tandis que l'autre tourne écrasant ainsi les grains des céréales.
Mais comment ça marche un moulin ?
L'arbre moteur, relié aux ailes, consiste en une grosse poutre de chêne qui entraîne un rouet (une grosse roue) aux dents de bois (on les appelle les alluchons).
Ce rouet actionne la meule par l'intermédiaire d'une "lanterne" solidaire de l'axe de la meule. Celui-ci a une section verticale : ainsi, les "secousses" que subit l'entonnoir de distribution du grain (la trémie) permettent au grain de descendre dans la meule.
Il fallait y penser !
Vous voyez ici le bas du rouet et la lanterne conique. A gauche de la photo, la trémie.
Sous la trémie, l'entonnoir permet au grain de descendre dans la meule. Vous remarquerez qu'il touche l'axe carré de la meule : c'est ainsi qu'il vibre à chaque fois que l'axe de la meule tourne d'un quart de tour.
J'allais oublier l'essentiel : la cloche !
Elle permet au meunier de dormir sur ses deux oreilles tant qu'il y a du grain à moudre car elle est en effet très astucieusement reliée aux vibrations de la trémie par l'intermédiaire du fameux axe de la meule à section carrée.
Fini le stress pour le meunier !
Un bon schéma vaut mieux qu'un long discours...
Avete capito tutto ?
J'apprends l'italien à haute dose sur le net : je rêve même en italien... ! Ca, c'est pour Loredana, ma copine italienne, si par hasard elle lit ce post.
Sur la photo, on peut voir aussi la charpente de la toiture.
Elle a été réalisée dans un bois venant du Canada si mes souvenirs sont bons, particulièrement imputrescible. Un échantillon en est accroché sur le mur.
Et voici la corde qui permet de monter les sacs de céréales ou de descendre les sacs de farine entre le RDC et l'étage supérieur.
Plusieurs photos à cet étage permettent de comprendre ce qu'était un moulin à vent autrefois.
Sur cette affichette, les outils principaux du meunier
La pelle à farine, la meule, le marteau à "rhabiller" les meules (entendez par là, en refaire les stries qui s'usent avec le temps) dont un exemple ci-dessous.
Notre guide bénévole de l'Association des Amis du Moulin de la Tour nous montre aussi au passage une date gravée à une encoignure de fenêtre : Nicolas 1666.
Si elle est d'époque, cela vieillit le moulin de dix ans de plus.
A l'étage inférieur se trouve la bluterie : sortis des meules, farine et son tombent dans le blutoir. A l'intérieur se trouve un cylindre tournant incliné, le sas. Il consiste en une fine toile de soie ou de crin fixée sur des cercles de bois (les laizes) . Le sas en tournant blute la farine issue de la meule en séparant la véritable farine du son plus grossier.
La mouture arrive par la partie relevée et par tamisage sort du sas suivant sa finesse. Des boules de bois coulissant le long des rayons formant les cercles frappent les laizes pour faciliter le blutage et pour les désengorger. Ceci est nécessaire sinon, tout finirait rapidement par sortir dans le bac de son.
Des sacs accrochés sous le cylindre récupèrent les différentes qualités de farine, pour les distribuer dans des sacs séparés.
Nous finissons la visite en regardant une série de photos montrant le déplacement du moulin en 1976.
Il a tout d'abord fallu restaurer la tour de pierres qui était en ruine.
Puis, la tour a été cerclée à l'aide de câbles d'acier pour la consolider et les portes ont été maçonnées avant de déchausser les fondations ; les anneaux servant à attacher les animaux de bât étaient encore en place. On a dégagé les soubassements pour couler le plateau de béton. Une plate-forme circulaire avec plots en béton a été réalisée. Une tranchée a ensuite été creusée pour y passer des rails. Le déplacement a été réalisé à l'aide d'un système isostatique de quatre charriots, comprenant chacun un vérin hydraulique de 250 tonnes roulant sur deux voies parallèles.
Le poids de la tour fut évalué à 315 tonnes.
Le 6 mai 1976, sous un soleil écrasant, en présence de milliers de personnes, de la presse et de la télévision, l'entreprise Saintrapt et Brice (*) assurait le déplacement de la tour, sur une distance de 35 mètres à la vitesse de 51 cm par minute. La partie du sous-sol a ensuite été remise en état, la partie béton disparaissant sous une butte de terre.
Il ne restait plus, après restauration de la tour, qu'à remettre en place la coiffe et tout son contenant (la meule et tout ce qui va avec).
Je ne peux résister à vous mettre ici les paroles d'une petite chanson que tous les élèves de MS connaissent.
, on ne se débarrasse jamais complètement de son passé !
Je suis la galette, la galette, Je suis faite avec le blé ramassé dans le grenier. On m'a mise à refroidir, mais j'ai mieux aimé courir ! Attrape-moi si tu peux ! Et elle se sauve si vite si vite qu'elle disparaît dans la forêt.
Vous voulez l'histoire complète ? Qu'à cela ne tienne !
(*) La société Saintrapt et Brice n'a pas été choisie au hasard par la municipalité d'Ivry. Elle avait de l'expérience dans ce domaine puisqu'elle a tout de même réalisé le déplacement du temple d'Amada lors de la construction du barrage d'Assouan.
Une visite très intéressante
Merci à la SHA du 13ème de nous l'avoir proposée.
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