• Les maisons de Georges Brassens avec Générations 13

      
    C'est Michel Duffau qui, pour la seconde fois cette année, guide cet après-midi l'atelier de Générations 13 intitulé "Petites promenades dans Paris". Il a choisi aujourd'hui de nous entraîner sur les pas de Georges Brassens en nous contant sa vie au fil des différents lieux qu'il habita dans Paris et même ailleurs.

    Le rendez-vous est donné à la station de bus Didot sauf que... la RATP est en grève ! Je rejoins donc, à pinces, la dite station où je retrouve une quinzaine d'autres adhérents de l'association, ayant sans doute été, comme moi, bercés par les mélodies de Brassens.

    Michel nous retrace tout d'abord l'enfance du poète, né à Sète en 1921 d'un père, Jean-Louis, qui est maçon et d'une mère napolitaine, Elvira, lingère.

    En compagnie de ses parents, consultant l'album de famille en 1954

    Les maisons de Georges Brassens avec Générations 13

    Georges Brassens va dédier plus tard une très belle chanson à ses parents, qu'il chantera en duo avec Patachou.

    Maman Papa

    Georges, que ses camarades surnomment "le gros", était un élève que l'on pourrait qualifier de "classique" mais au collège il s'ennuie ferme. Sa vie commence après la classe, entre baignades et virées avec les copains. Seul son professeur de français, Alphonse Bonnafé, l'intéresse beaucoup. Ce dernier encourage le jeune homme à lire de la poésie, lui qui plus tard mettra d'ailleurs en musique ses poètes préférés (François Villon, Victor Hugo et Aragon). Georges va par la suite, pendant toute sa vie, dévorer les livres.

    la maison, tout le monde chante et le bambin connaît rapidement le répertoire à la mode, avec une prédilection durable pour Ray Ventura puis Charles Trenet. Il écoute aussi les chansons de Fréhel et de Mireille (vous savez..., Le Petit Conservatoire de la chanson). Un peu plus tard, il découvre le jazz qui influencera ses compositions très rythmées et sa scansion, reconnaissables entre toutes. 

    Après avoir commis quelques larcins en compagnie d'une bande de "garnements", Georges écope de quinze jours de prison avec sursis (les avis divergent sur la durée exacte de la peine). Exclus du lycée, son père l'envoie à Paris où il est hébergé chez sa tante, Antoinette, la sœur de sa mère. Celle-ci habite une pension de famille au 173 de la rue d'Alésia dans le XIVème arrondissement.

    Nous sommes dans les années 1940 : Georges Brassens a environ 17 ans.

    Les maisons de Georges Brassens avec Générations 13

    Antoinette possède un piano et des méthodes pour apprendre : Georges, qui vient d'être engagé aux usines Renault pour trois mois (même si son désir profond était de ne pas travailler !) ne se le fait pas dire deux fois : il compose ses premières musiques au piano puis les transcrit à la guitare pour pouvoir se produire dans les cabarets de la rive gauche qui sont exigus.

    Il écrira quelque 200 chansons dont certaines ont été composées dès cette époque ou un peu plus tard comme : La mauvaise réputationLa mauvaise herbeles quatre bacheliersLes ricochets...

    Brassens chante ici La mauvaise herbe en compagnie de ses amis attablés. Parmi eux, on reconnaît Pierre Tchernia et Marcel Amont avec lesquels il est très lié.

     

    Les ricochets, une vraie pépite ! Ecoutez-le faire l'apologie d'Apollinaire...

    C'est devant cette grande photo de l'artiste placardée sur un mur aveugle de la rue d'Alésia que Michel va faire durer le suspense pendant une petite demi-heure avant que l'on découvre "pour de vrai" la fameuse impasse Florimont où Georges Brassens habitera pendant 22 ans.

    Les maisons de Georges Brassens avec Générations 13

    Le temps de nous conter la suite de l'histoire !

    Les maisons de Georges Brassens avec Générations 13

    A cette époque, Brassens rencontre une amie de sa tante, Jeanne Le Bionnec, de trente ans son aînée, couturière, avec laquelle il va entretenir une liaison. Mais la guerre éclate et il est envoyé au STO à Basdorf, près de Berlin, en Allemagne pour travailler à l'usine BMW qui fabrique des moteurs d'avion.

    Il va s'y faire une bande de copains qu'il ne quittera jamais. Il rencontre en particulier Pierre Onténiente dit "Gibraltar" qui travaille à Basdorf comme bibliothécaire qui deviendra son secrétaire particulier et René Iskin qui sera le premier interprète de ses chansons.

    Brassens et Gibraltar en 1975

    Les maisons de Georges Brassens avec Générations 13

    Michel Duffau nous raconte une anecdote concernant cette période : dans leur chambrée, les jeunes gens râlaient après Brassens qui lisait ou qui écrivait ses poèmes à la lueur de la bougie tard dans la nuit jusqu'à ce que le jeune Georges se propose, en compensation, de leur préparer le café du matin...

    Il nous explique aussi que les allemands, pour dissuader les jeunes de s'évader lors d'une permission, les menaçaient de représailles envers leurs camarades en cas d'évasion. Georges étant bien aimé de tous, ses copains l'encouragèrent à prendre la poudre d'escampette à l'occasion d'un permission, ce qu'il fit : il ne reviendra jamais en Allemagne.

    Nous sommes le 21 mars 1944 : Georges emménage chez Jeanne et Marcel Planche, au numéro 9 de l'impasse Florimont. Marcel boit pas mal mais c'est un bon gars. Un drôle de ménage à trois s'instaure alors entre Jeanne et ses deux hommes. Marcel ne prend pas ombrage de la liaison entre son épouse et leur jeune protégé. Mieux ; il l'adopte comme un fils.

    Jeanne et Georges quand il n'a que 19 ans.

    Les maisons de Georges Brassens avec Générations 13

    Alors, cette impasse, on va pouvoir la voir... ?

    Les maisons de Georges Brassens avec Générations 13

    Mais oui, pas de souci !

    Voici déjà deux plaques intéressantes : celle où l'on voit que Georges Brassens habita cette impasse entre 1944 et 1966 (époque pendant laquelle il écrivit ses premières chansons) surmonte une autre plaque qui indique qu'ici - dans l'impasse Florimont - est né son contrebassiste, Pierre Nicolas.

    Quel hasard tout de même !

    Les maisons de Georges Brassens avec Générations 13

    Tout au fond de l'impasse, de deux mètres de large, la maison de Jeanne et Marcel que nous commente Michel.

    Les maisons de Georges Brassens avec Générations 13

     Il s'agit d'une maison - sans eau ni électricité - avec un étage et une cour attenante où vivent toutes sortes d'animaux : des chats, des chiens, des volatiles etc.

    Les maisons de Georges Brassens avec Générations 13

    Brassens va y écrire La cane de Jeanne.

    Les maisons de Georges Brassens avec Michel Duffau

     

    Brassens en compagnie de Jeanne et de Marcel

    Les maisons de Georges Brassens avec Générations 13

    Le 22 septembre 1994, à l’initiative de l’association Les Amis de Georges, un bas-relief en bronze - réalisé par le chanteur Renaud - est fixé contre le mur de la maisonnette.

    Les maisons de Georges Brassens avec Générations 13

    En-dessous, une petite boîte à musique en forme de CD représente l'ouïe d'une guitare : une petite manivelle permettait, du temps où elle fonctionnait encore, de pouvoir écouter une chanson du poète.

    Les maisons de Georges Brassens avec Générations 13

    Nous aurions pu ainsi écouter Les amoureux des bancs publics, une chanson qui a fait le tour du monde.

    Le 1er octobre 2005, Claudy Lentz de la ferme Madelonne, à Gouvy en Belgique, prit l'initiative de mettre trois chats sur la maison de Georges, en souvenir des nombreux chats recueillis par la Jeanne. L'autorisation put être obtenue auprès de Pierre Onténiente grâce à l'intervention de Valérie Ambroise, une artiste qui chanta Brassens après sa mort. Ces chats en terre cuite ont été réalisés par Michel Mathieu, potier à Tulette.

    Les maisons de Georges Brassens avec Générations 13

    Les maisons de Georges Brassens avec Générations 13

     Pendant une décennie (de 1942 à 1952), le couple va nourrir, choyer, blanchir, le jeune Brassens jusqu’à ses débuts chez Patachou.

    Le voici photographié dans son bureau en compagnie de son chien.

     Les maisons de Georges Brassens avec Générations 13

    Michel nous emmène, après cette découverte de l'impasse Florimont, nous "poser" dans le square voisin, l'occasion d'une petite photo du groupe.

    Les maisons de Georges Brassens avec Générations 13

    Là, Michel continue de nous raconter Brassens...

    Trop timide pour s’exhiber sur scène, Georges attendra dix ans avant de présenter ses chansons. Il peaufine, rature, corrige ses textes jusqu’à la perfection autant que ses mélodies : Pauvre Martin Une jolie fleurIl n’y a pas d’Amour heureuxJe me suis fait tout petit...

    Il dédiera plusieurs chansons à Jeanne et Marcel.

    Chez Jeanne, la Jeanne...

    L'auvergnat (même si Marcel était né à Brie-Comte-Robert...)

    Après la guerre, ce furent des années de grande misère où il allait souvent se faire nourrir chez ses amis du STO.

    A cette époque, il compose BonhommePauvre Martin et...

    A l'ombre des maris

    Brassens a en effet fréquenté beaucoup de femmes mariées, clandestinement pour ne pas faire de mal à Jeanne. Ainsi la petite "Jo", une jeune fille de seulement 17 ans qui lui inspira Une jolie fleur et Putain de toi.

    Georges Brassens, c'est bien connu, est un grand timide : comme beaucoup d'auteurs-compositeurs, il n'aime pas chanter. Il a beau auditionner dans des cabarets, il est souvent refusé (malgré l'aide de son ami Jacques Grello : vous vous souvenez, l'homme aux lunettes rondes à la télé !)

    Michel nous raconte une anecdote amusante (que j'ai mal entendue) mais il me semble que Jacques Grello avait payé trop d'impôts au fisc et qu'il a acheté avec la somme qu'on lui avait rendue une guitare qui deviendra celle de Brassens.

    C'est aussi l'époque de cette chanson que j'entendais très souvent chez mes parents étant jeune et que j'adorais, Le bricoleur. C'était sur un vinyle de Patachou et je la trouvais vraiment très drôle. J'ai toujours le disque et le tourne-disque qui va avec ! Allez, je ne résiste pas à vous la faire écouter, comme Michel nous l'a lui-même fredonnée...

    Au fait, savez-vous pourquoi ce surnom de Patachou... ? Michel nous explique qu'elle avait ouvert une boulangerie et lui avait donné le nom de "Chez Patachou". Ce nom lui est resté.

    C'est vraiment elle qui a lancé Brassens en lui donnant l'occasion de se produire à l'issue de l'un de ses propres récitals en janvier 1952. Le premier soir, elle chante Brave Margot et Les Amoureux des bancs publics et propose à son public de rester à la fin du spectacle afin de découvrir l'auteur de ces chansons. Brassens monte alors sur la scène du cabaret et chante, entre autres, Le Gorille et Putain de toi, que Patachou estimait ne pas pouvoir interpréter elle-même.

    Encouragé par PatachouBrassens fait ses débuts professionnels sur la scène du Théâtre des Trois Baudets, avec Jacques Canetti qui l'engage pour trois ans et qui enregistre ses premiers disques 78 tours chez Polydor (dans lesquels il chante La mauvais réputationLe mauvais sujet repentiLe gorille et Le petit cheval). C'est à partir de ce moment que Brassens est véritablement lancé.

    Finis les doutes, les désillusions, les découragements, les incertitudes, l'inconfort, le lit-cage, l'eau gelée dans la cuvette, la lumière aux bougies, finies les années galères à la charge exclusive de Jeanne et de Marcel !

    Une autre femme qui a beaucoup compté dans la vie de Brassens : il s'agit de Joha Heiman, mieux connue sous le nom de Püppchenqu'il rencontre en 1947 et dont il partagera la vie pendant plus de trente ans.

    Elle lui inspire cette chanson : Je me suis fait tout petit devant une poupée

    Elle est d'ailleurs enterrée au cimetière de Sète aux côtés du poète même s'il n'a jamais voulu lui passer la bague au doigt, l'occasion tout de même d'écrire une chanson...

    La non demande en mariage

    Michel nous fait ensuite un petit résumé de la carrière de Brassens : j'ai pris quelques notes rapidement donc je ne suis pas sûre des dates...

    En 1953, il se produit aux Trois Baudets et à La Villa d'Este.

    En 1954, il triomphe à l'Olympia deux fois et fait Bobino quatre fois.

    En 1955, c'est à nouveau l'Olympia qui l'accueille.

    Entre 1954 et 1977, il se sera produit treize fois à Bobino !

    Je le verrai deux fois dans ce théâtre mythique.

    A propos des Trois Baudets : séduit par les chansons qui passent à la radio, l’écrivain René Fallet va l’écouter un soir dans cette salle de concert du XVIIIème arrondissement. Il en sort ravi et son enthousiasme le pousse à publier un article dithyrambique dans Le Canard enchaîné du 29 avril 1953 : "Allez, Georges Brassens !"

    "La voix de ce gars est une chose rare et qui perce les coassements de toutes ces grenouilles du disque et d’ailleurs. Une voix en forme de drapeau noir, de robe qui sèche au soleil, de coup de poing sur le képi, une voix qui va aux fraises, à la bagarre et... à la chasse aux papillons."

    Touché, Brassens lui écrit pour le remercier et lui demander de venir le voir aux "Trois Baudets". Leur rencontre sera le début d’une amitié qui durera le restant de leur vie.

    Michel en a presque terminé avec "Les maisons de Brassens".

    Il nous parle tout de même encore du moulin qu'il acheta à CrépièresLe Moulin de la Bonde, où il se rend très souvent pour réunir ses bandes de copains, la maison de Jeanne étant trop petite.

    Ses copains, ce sont : les copains de son enfance à Sète, Les copains du STO à Basdorf, et les copains du milieu de la chanson. Dans ce dernier cercle, il y aura Marcel Amont et Fred Mella (Les Compagnons de la Chanson).

    Georges Brassens a revendu ce moulin quand il a été question de construire, à côté, un lotissement. Et puis, il faut dire qu'il s'est fait souvent cambrioler...

    Les maisons de Georges Brassens avec Générations 13

    Ces cambriolages à répétition nous ont laissé une belle chanson...

    Stances à un cambrioleur

    La fin de notre promenade nous conduit dans le XVème arrondissement voisin, rue Santos-Dumont où Brassens habita dans les années 1970.

    La villa Santos-Dumont voisine de la rue du même nom possède beaucoup de charme. Il existe comme ça dans Paris, des havres de paix que l'on ne soupçonne pas toujours.

    Les maisons de Georges Brassens avec Générations 13

    Les maisons de Georges Brassens avec Michel Duffau

    La rue Santos-Dumont présente un alignement de petites maisons datant du début du XXème siècle. C'est dans deux de celles-ci, aux N° 42 et 46, que Brassens a vécu.

    Les maisons de Georges Brassens avec Générations 13

    Une dernière photo pour vous présenter la maison que Georges Brassens acheta en Bretagne : il s'agit de la Villa Flandry à Lézardrieux dans les Côtes d'Armor. L'artiste venait s'y reposer ou y trouver l'inspiration jusqu'à sa mort en octobre 1981. On en rêverait, non ?

    Les maisons de Georges Brassens avec Générations 13

    Merci à Michel Duffau d'avoir préparé cette sortie et de l'avoir animée.

    Pour ma part, je l'ai beaucoup appréciée.


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