Dans le cadre des "Mardis Découvertes" de l'OT de Châtillon, nous avons pu découvrir une superbe demeure datant de la fin du XVIIe siècle : il s'agit du "Petit Versailles".
Les paragraphes qui suivent (en italique) s'inspirent d'une étude de M. Dominique Masson, historien châtillonnais, publiée sur le blog de Christaldesaintmarc "Châtillonnais en Bourgogne", bien connu des habitants de la région (lien ICI).
Le Petit Versailles fut construit vers la fin du dix-septième siècle sur un promontoire dominant un méandre de la Seine, dans le secteur de la Charme de Braux, par Joseph-Bernard Soyrot, un châtillonnais qui était contrôleur général des finances en Bourgogne et Bresse. Selon d’autres auteurs, c’est son père, Claude-Pierre Soyrot, qui en aurait entrepris l’érection pour goûter en paix à la vie provinciale. A l'origine, il s'emblerait que ce soit même son grand-père, Claude Soyrot, qui en 1646 décida de cette construction qui ne reçut que plus tard le nom de Petit Versailles, puisque le Versailles de Louis XIV ne devint la résidence royale et celle de la cour qu’à partir de 1682.
Joseph Bernard Soyrot fut toute sa vie un lettré : il y réunit des livres rares et de grande valeur, des souvenirs divers de l’antiquité, des tableaux, des ciselures, des œuvres d’art d’un goût exquis, en un mot, tout ce qui plait à une personne docte et élégante. Tout cela fut perdu, ou même, après sa mort, brûlé par des membres de sa famille, qu’effraya peut-être la liberté, sinon de ses pensées, du moins de son langage.
Joseph Bernard Soyrot recevait dans sa demeure ses amis de Dijon ou d’ailleurs, notamment Bussy Rabutin, cousin de Mme de Sévigné et, selon Bernard de La Monnoye, en sa villégiature perpétuellement volontaire il faisait chère lie, chantait en haute ou en basse note, caressait Claudine, croquait biscuits à toute heure, dansait gavotte et sarabande, jouait aux cartes les jours de pluie, se promenait s’il faisait beau, mangeait bien, dormait mieux, s’épanouissait la rate en compagnie de « filles » aimables.
Le "Petit Versailles" est devenu un Institut Médico Educatif (IME) et accueille à ce titre une vingtaine d'enfants et d'adolescents handicapés (garçons et filles) qui y reçoivent les soins appropriés. C'est Madame Dupland, chef de service à l'IME, qui nous a fait visiter le château, tout naturellement situé dans la rue du Petit Versailles et dans lequel on entre par cette superbe grille en fer forgé ouvragée.
Vous n'avez encore rien vu : il ne s'agit là que de la façade latérale du château.
Dans l'un des deux chiens-assis de la toiture, une inscription date la bâtisse : 1647.
Nous entrons tout d'abord dans une pièce à vivre où une toile ancienne (non identifiée) trône en bonne place, décorant le dessus d'une ancienne cheminée.
Nous longeons ensuite les bâtiments modernes réservés à l'administration pour nous rendre dans le parc du Château.
Au bout du bâtiment, un escalier (moderne) permet d'accéder au parc dans lequel notre guide nous fait remarquer plusieurs exemplaires de très élégants bancs de pierre à volutes qui y ont été conservés.
Un très grand espace engazonné permet aux enfants de courir ou de jouer.
Vous remarquerez la très jolie décoration de la galerie de faîtage et ses épis.
Il a "de la gueule" ce petit château !
A noter que l'aile gauche a été rajoutée ultérieurement : en témoignent la largeur différente des deux ouvertures du rez-de-chaussée donnant accès aux caves,
et la lucarne qui a été percée dans sa toiture pour favoriser l'éclairage de la pièce située dans les combles.
Nous sommes un petit groupe à faire cette visite guidée, une animation à laquelle nous sommes toujours fidèles.
On découvre mieux sur cette photo le superbe escalier en Fer-à-Cheval qui donne accès au faux rez-de-chaussée.
En route pour la visite...
Dans la pièce à laquelle nous aurons accès et dont j'ai oublié la fonction actuelle, une belle cheminée en bois sculpté surmontée d'un trumeau : celui-ci représente une scène de chasse très conventionnelle...
Et maintenant, direction la Seine !
Un portail cadenassé protège les enfants de l'accès à la Seine qui coule au fond du parc.
Peu d'eau en cette période de grande sécheresse...
Retour dans le parc pour suite de la visite : de jeunes arbres ont été plantés récemment.
Madame Alphant fait à nouveau référence ci-dessous à l'étude de M. Dominique Masson pour vous donner une idée de ce que ce parc pouvait être à l'origine.
Joseph-Bernard Soyrot voulut également un jardin correspondant à ses goûts. Il fit aménager des terrasses étagées, des canaux de pierres sculptées arrosés par la Seine, des parterres réguliers plantés d’ifs taillés et des cabinets de charmilles ornés de statues dues au ciseau de Jean-Baptiste Bouchardon.
Ce somptueux jardin fut célébré par Voltaire, dans une satire de jeunesse intitulée Le bourbier, écrite en 1714 (vers 13 à 19) :
Au haut du mont sont fontaines d’eau pure,
Riants jardins, non tels qu’à Châtillon
En a planté l’ami de Crébillon,
Et dont l’art seul a fourni la parure :
Ce sont jardins ornés par la nature.
Là sont lauriers, orangers toujours verts ;
Séjournent là gentils feseurs de vers…
L’ami de Joseph-Bernard dont parle Voltaire est Joseph Jolyot de Crébillon, né à Dijon, auteur dramatique et membre de l’Académie française.
Sur le plan de 1759, on distingue des plantations d’arbustes bien alignés et des parterres à la française non loin, qui devaient peut-être faire partie de la propriété.
Selon la description faite par Emile Pic,
« Le jardin comprend huit grands carrés, au milieu desquels se développe un bassin d’eau vive, et ces carrés ont leurs angles ornés de statues de pierre, que Bouchardon a sculptées en partie, et qui représentent les saisons ou d’autres sujets. Partout aussi, et toujours comme au Versailles royal, des ronds de buis, des lits de gazon, des tables de pierre, des espèces de cabinets, mystérieux et discrets, établis dans l’épaisseur des charmilles, des allées larges ou dérobées, des labyrinthes aux issues faciles. Ajoutons un verger de grande étendue, une « melonnière » bien entretenue, une serre voûtée pour les orangers, etc. »
Contournant le bâtiment par la gauche, nous retrouvons la barre rocheuse sur laquelle s'appuie le château.
Une photo empruntée au blog de Cristaldesaintmarc...
Notre guide nous fait rentrer dans la salle à manger des enfants, nous faisant remarquer que ces derniers la respectent bien. Elle devait être une pièce d'apparat à l'époque car elle est décorée de nombreux panneaux peints fort charmants.
Seul le radiateur n'est pas d'époque !
Remarquez la finesse des peintures...
De très belles moulures au plafond achèvent la décoration de cette pièce.
Nous terminons cette visite par la façade sur rue du château restaurée à la fin du XIXe siècle.
Une bien belle visite, encore une fois !