Grâce à ma sœur, Arlette, qui m'a prêté sa carte du Louvre , je suis allée ce dimanche matin visiter l'exposition Chefs d’œuvre de la Collection Torlonia qui devait se terminer ces jours-ci mais qui a été prolongée jusqu'en janvier prochain, sans doute du fait de son succès.
Me voici donc au centre de la Pyramide à la recherche de l'aile Denon. J'ai appris à ce propos que Vivant Denon, égyptologue, a été le directeur général du Louvre entre 1802 et 1815.
L'intérêt, outre la découverte des sculptures par elles-mêmes, réside dans le fait que cette exposition se tient dans les appartements d’été tout nouvellement restaurés (vingt mois de travaux tout de même) d’Anne d’Autriche, appartements que Louis XIV fit aménager par Louis Le Vau pour sa mère, veuve de Louis XIII, entre 1655 et 1658 alors qu'il n'a que 17 ans. Là, une longue suite de pièces accueille la souveraine à partir de 1659 : le nouvel appartement comprend six pièces placées en enfilade.
On trouve ainsi successivement : la Rotonde de Mars, le Grand salon, l'Antichambre ou salle des Saisons, le Vestibule ou salon de la Paix, le Grand cabinet ou salle des Héros romains, la chambre, le Petit cabinet, et enfin la salle d'Auguste.
Mais revenons à nos moutons...
Il s'agit de la plus grande collection privée de sculpture antique romaine conservée à ce jour (celle rassemblée par les princes Torlonia durant tout le XIXe siècle à Rome) qui quitte l'Italie pour la première fois.
En farfouillant sur mon ami le net, j'ai pu visionner une conférence donnée au mois de juin par Martin Szewczyk, conservateur au département des Antiquités grecques, étrusques et romaines au musée du Louvre, qui m'a éclairée sur l'exposition et dont je me suis aidée pour rédiger ce post.
Dès l'entrée de l'exposition, on est tout de suite dans l'ambiance : l'or est à l'honneur dans cette Rotonde de Mars.
La fresque centrale a été peinte par Jean-Simon Berthélémy en 1802 : il s'agit de "L’Homme formé par Prométhée et animé par Minerve" ou "l’Origine de la sculpture".
Celle-ci a été reprise en 1826 par Jean-Baptiste Mauzaisse.
Les stucs de la Rotonde de Mars
Voici la première salle dans laquelle le public a accès. Remarquez le riche carrelage, qui semble être en marbre (les murs, eux, sont en stuc-marbre).
L'ensemble est du plus bel effet, non ?
A l'entrée, un portrait d'Alessandro Torlonia (1800-1886) : c'est lui qui est à l'initiative de l'institution d'un musée destiné au public regroupant les collections familiales.
Ce bouc en marbre du début du IIe siècle après J.C. a été restauré par Le Bernin (1598-1680) au XVIIe siècle : l'artiste en a sculpté la tête, très expressive.
Magnifique, non ?
Ces photos sans public proviennent du diaporama du conférencier qui a eu le privilège de visiter l'exposition de façon privée. Il en était tout autrement de ma propre visite où le public était venu nombreux...
Cette salle est dite "Salle des Portraits".
Dans la Rome antique, dans les maisons des grandes familles, on exposait des portraits des ancêtres : ce sont les photos de l'époque.
Un peu pâlotte ma photo du plafond...
Au centre de la pièce trône, bien en évidence et sous verre, un portrait de jeune femme d'une grande simplicité et très moderne je trouve, et pourtant il date du milieu du Ier siècle avant J.-C.
Il s'intitule La Fanciulla di Vulci.
Voici maintenant, à l'opposé, le portrait d'un homme âgé dont le caractère bien trempé semble-t-il a été saisi sur le vif par l'artiste qui l'a sculpté.
Il s'agit d'Euthydème de Bactriane (vers 200 avant J.-C.), un souverain grec.
Buste d'Hadrien, empereur romain de 117 à 138 après J.-C., vêtu de sa cuirasse de chef militaire
Elle sort de chez le coiffeur et va sûrement à un mariage
Un art de la copie
Copies romaines de "Satyre au repos" datant du IIe siècle après Jésus-Christ d'après un original de Praxitèle datant de 330 avant J.-C.
La copie est très pratiquée à Rome grâce à une technique de report de mesures très sophistiquée et qui permet d'obtenir l'exact double de l'original.
Statue en pied (début du Ier siècle après J.-C.) restaurée avec un portrait de Germanicus (15 avant J.-C. - 19 après J.-C.
Il s'agit du seul bronze de la collection Torlonia.
Le conférencier parle du rôle des portiques en textile qui permettent de mettre en valeur certaines des œuvres, de les illuminer...
Les styles du passé grec
L'original en bronze que copie cette sculpture d'Eros archer (fin du IIe siècle après J.-C.) est attribuée au sculpteur grec Lysippe (actif entre 370 et 305 avant J.-C.).
Changement de taille avec cette immense vasque dite "Tazza Albani", en marbre naturellement, qui devait orner un jardin ou un sanctuaire. Elle est décorée sur son pourtour des douze travaux d'Hercule, gages de son immortalité (troisième quart du Ier siècle avant J.-C.).
Je ne m'y connais pas trop en travaux d'Hercule mais, renseignements pris, il est ici en train de dompter les juments de Diomède.
Le roi Diomède possédait quatre juments qu'il nourrissait de chair humaine. Hercule fut chargé par Eurysthée de capturer ces bêtes. Il commença par tuer le roi pour le donner en pâture à ses juments et les dompter. Il put ainsi les emmener docilement.
Et ici, il ramène Cerbère, le chien à trois têtes, des enfers.
Un regard vers le plafond
L'influence de la Grèce sur la culture romaine
Statues d'un Satyre et d'une Nymphe, groupe dit "De l'invitation à la danse"
Statues romaines (trouvées ensemble dans une villa romaine en 1830) sculptées entre la seconde moitié du Ier siècle et le début du IIe siècle après J.-C d'après une œuvre originale grecque du IIe siècle avant J.-C.
Groupe sculpté représentant un enfant jouant avec une oie (copie romaine sculptée à partir d'un original grec datant des IIIe-IIe siècles avant J.-C.
Les sujets de ce genre, au style pittoresque, se développent à partir de cette époque.
Groupe sculpté représentant Ulysse caché sous un mouton (copie romaine exécutée dans la seconde moitié du Ier siècle après J.-C. d'après un original grec datant du IIe siècle avant J.-C.
Il s'agit bien là du célèbre héros de la guerre de Troie qui échappe ainsi au cyclope Polyphème.
Ce "Buste de satyre ivre" fait la couverture du catalogue. Je le trouve vraiment très beau malgré ses petites cornes ! (copie romaine du Ier siècle après J.-C. d'après un original grec du IIIe siècle avant J.-C.)
Voici ici la personnification d'un fleuve, le dieu Nil, que l'on reconnait grâce à plusieurs symboles (corne d'abondance, sphinx, roseau et crocodile).
(seconde moitié du Ier siècle après J.-C.)
Admirez la finesse de sa barbe et de sa chevelure.
Ouh..., celui-là je n'aimerais pas le rencontrer !
Je n'ai jamais vu une telle sculpture (copie romaine sculptée à l'époque impériale Ier-IIIe siècles après J.-C. toujours d'après un original grec bien antérieur) et je ne dirais pas que j'en suis fan... Un manque de simplicité, non ?
Il parait qu'il s'agit de l'Artémis d'Ephèse (Turquie actuelle). Artémis étant la déesse de la Nature et de la Chasse, elle en porte les attributs : plusieurs rangées de "petits sacs" magiques qui sont un symbole de fécondité et des têtes d'animaux.
Il m'a fallu de la patience pour arriver à prendre cette photo de la Salle d'Auguste.
Le moins qu'on puisse dire est qu'il y a du monde dans la sphère céleste ! Que des Dieux et des Déesses en grande ou en petite tenue...
Dans cette pièce, des œuvres beaucoup plus monumentales tel ce sarcophage figurant un cortège accompagnant un magistrat et son épouse - 250 / 260 après. J.-C.
J'ai trouvé l'arrière de la sculpture extrêmement sobre et d'une grande modernité.
Je trouve amusant que le Louvre parle de ce bas-relief du port de Rome (Portus Augusti) comme d'une carte postale de l'époque (c'est la description qui est faite à l'adresse des jeunes visiteurs). Si j'ai bien compris, il ne s'agit pas d'une véritable "photo" du port mais plutôt comme une accumulation des différentes activités portuaires, symboles de la vie maritime de la ville.
(Début du 3éme siècle après J.-C.)
Ici, au vu des volatiles accrochés par les pattes, c'est d'une enseigne de boucherie qu'il s'agit (milieu du IIe siècle après J.-C.) même si le relief est monumental.
Ce relief, lui, figure le mythe du sacrifice d'un taureau par le dieu Mithra (vers 181 après J.-C.
Au fond de la pièce, deux grands sarcophages garnis de superbes reliefs
Celui-ci représente le couple de commanditaires au centre : il s'agit du sarcophage du Centurion Lucius Pullius Peregrinus dont le portrait a été sculpté à son effigie (celui de sa femme aurait dû l'être aussi mais il n'a pas été réalisé). Tenant des rouleaux de parchemin, ils se sont fait représenter en homme et femme de lettres, lui comme un des sept Sages de la tradition grecque, elle comme l'une des neuf Muses de la mythologie. (milieu du IIIe siècle après J.-C.)
Statuette de Léto fuyant le serpent Python avec ses enfants, Apollon et Artémis (copie romaine de la fin du IIe siècle après J.-C. d'après un original grec du Ier siècle avant J.-C.)
Adorable, non ?
Une histoire en commun
Il s'agit bien sûr ici de l'histoire commune entre le musée Torlonia et le musée du Louvre. Les œuvres suivantes proviennent du fonds privé du Louvre ici présentés dans la Cour du Sphinx qui a été couverte dans les années 1930 pour constituer un espace muséal supplémentaire.
Ce fonds est largement composé d’œuvres qui ont, avant d'enrichir des institutions muséales, servit au faste des villas et des palais de l'aristocratie romaine, puis européenne.
Au passage, j'admire l'architecture.
Buste d'Hérode Atticus (vers 161 après J.-C.) trouvé dans sa villa sur la Via Appia
Sénateur romain, citoyen athénien, sophiste, ami des empereurs, bienfaiteur et bâtisseur, mais aussi figure controversée à la Cour impériale et dans sa patrie, Hérode Atticus est une personnalité centrale des réseaux intellectuels grecs au IIe siècle après J.-C. C'est aussi un mécène et un collectionneur dont le goût illustre l'attachement profond de ces derniers à la culture grecque classique.
Statue de paysan occupé à vider une dépouille d'animal, dit "l'Ecorcheur rustique" (statue romaine de l'époque impériale d'après une œuvre originale grecque du IIe siècle avant J.-C.)
J'adore le visage de l'écorcheur qui semble prendre plaisir à la chose !
Sarcophage figurant les travaux d'Héraclès (vers 170 après J.-C.)
Ce sarcophage, décrit à partir du XVIe siècle, se trouvait dans la cour du Palais Savelli, en Turquie, palais d'une famille noble qui rassemblait des antiques depuis le XVe siècle.
On voit ici le héros grec lutter contre un lion, puis une hydre, et porter un taureau.
Restaurer l'antique, une histoire
C'est à partir du XVIe siècle que, de manière systématique, on restaure les sculptures antiques pour les intégrer dans les résidences aristocratiques. D'abord l'affaire d'artistes, le XVIIIe siècle instaure la véracité archéologique et introduit le fragment non complété.
Statue d'Héraclès restaurée à partir de plusieurs originaux antiques (XVIIe siècle)
Les fragments constituant la restauration ont été intentionnellement laissées visibles pour cette exposition.
Statue d'Aphrodite accroupie, dite "Cléopâtre" (copie romaine sculptée au Ier siècle après J.-C. d'après une oeuvre originale grecque du milieu du IIIe siècle avant J.-C.)
C'est la présence du serpent, en bas, qui a permis de l'identifier comme une référence à son suicide. Cette interprétation a motivé la restauration d'un vase à parfum dans sa main droite
Et voilà, c'est fini...
J'en ai pris plein les yeux !