☻ Journées du Patrimoine : Visite du Château de la Reine Blanche
17 septembre 2017 - Changeons de siècle pour cette nouvelle visite des Journées du Patrimoine : nous voici transportés au début du XVIème avec ce Château de la Reine Blanche - situé entre les rues des Gobelins, Berbier-du-Mets et Gustave Geoffroy dans le XIIIème arrondissement - dont l'histoire est étroitement associée à celle de la Bièvre recouverte ici même au début du siècle dernier.
Le Château de la Reine Blanche en 1898
Le château de la Reine Blanche actuellement
Notre jeune guide - bénévole - nous met tout de suite au parfum :
de château nenni, de reine itou !
L'origine du bâtiment remonterait au XIIIème siècle : Blanche de Bourgogne, épouse de Charles IV, l'aurait-elle occupé ? Marguerite de Provence, veuve de Saint-Louis, aurait-elle établi ici sa résidence ? Blanche de Castille aurait-elle fait construire pour son propre usage ce magnifique hôtel qui, au cours du Bal des Ardents (★) - que l'on ne peut localiser avec certitude -, aurait été détruit en 1392 par un incendie qui fit perdre la raison au roi Charles VI ?
(★) Voir l'histoire - pour le moins "croustillante" - ... en fin de post.
Aujourd'hui, le mystère de son nom demeure encore entier. Ce qui est sûr, c'est que le blanc a été jusqu'à Catherine de Médicis la couleur de grand deuil des reines au cours de leur veuvage.
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L'actuel bâtiment à tourelles a été construit au début du XVIème siècle, sur l'emplacement supposé de l'ancien château, par la famille Gobelin qui voulait en faire un usage d'habitation. Vers le milieu du XVIIIème siècle, il fut transformé en teinturerie. Il passa ensuite entre les mains de divers propriétaires, à la suite de multiples adjudications.
En 1827, la teinturerie fut transformée en tannerie. La couverture définitive de la Bièvre, en 1912, entraîna la disparition des activités du quartier, lequel déclinera irrémédiablement.
En 1980, son classement "Monument Historique" le sauva d'une destruction annoncée et inéluctable. En témoignent les photos présentées sur différents chevalets.
Le corps de logis, en pierre de taille, possède de belles fenêtres à meneaux typiques de la Renaissance et une tourelle à pans coupés coiffée d’une poivrière.
Notre guide nous montre les escaliers hélicoïdaux des deux tourelles, portés par d’élégantes vis spiralées en chêne (datant du XVIème siècle) d'un seul tenant sur une hauteur de 14 mètres (les deux étages).
Nous ne passerons pas ces belles portes : la demeure est privée.
La charpente de la tourelle est d'origine : elle peut supporter le poids des ardoises qui recouvrent la toiture de la tour poivrière. Une seule des poutres a été consolidée par des vis, toutes les autres sont chevillées d'origine.
A l’arrière, une galerie couverte à pans de bois surplombe une deuxième cour. Celle-ci mène aux anciens ateliers qui longent la rue Berbier-du-Metz : installés au bord de la Bièvre (aujourd’hui enfouie), ils ont abrité la manufacture de Jean Glucq, célèbre teinturier qui inventa le "bleu de Roi" et le "rouge à l'écarlate" à la demande de Colbert.
La photo ci-dessous montre l'état de délabrement des bâtiments avant leur restauration.
A la bonne heure, ça a changé de poil !
Sous les arcades, une exposition de photos montre le passé des lieux.
En 1787, la dénomination de la Bièvre était « ruisseau des Gobelins » en référence à Gilles Gobelin, teinturier à l'écarlate qui s'établit au Bord de la rivière sous François Ier, vers 1500, dans ce qui deviendra l'actuel ilôt de la Reine Blanche. Elle alimente de nombreuses tanneries, blanchisseries, teintureries et, entre autres, la fameuse manufacture des Gobelins.
La Bièvre au début du XXème siècle
Les façades en clayonnage de bois situées à gauche de la photo ont inspiré les architectes qui ont créé en 2000 les immeubles à usage d'habitation de la rue Berbier-du-Mets. Il s'agissait de greniers dans lesquels les tanneurs faisaient sécher leurs peaux.
La teinture des tissus et le tannage des peaux près de la Bièvre
Dans la cour, un puits
On peut y voir des claies utilisées comme séchoirs lorsque les fils venaient d’être teints.
(★) L'histoire du bal des ardents
Le 28 janvier 1393 à l'occasion du remariage de l'une de ses dames d'honneur, Catherine de Hainserville, allemande comme elle, Isabeau de Bavière, femme de Charles VI, donna un bal costumé dans "l'hostel de la Reyne Blanche" qui, suivant la tradition, devait être suivi d'un charivari (une sorte de carnaval).
Le roi Charles VI et cinq de ses gentilshommes se déguisèrent en animaux sauvages, masqués et revêtus d'une tunique enduite de poix et recouverte de plumes et d'étoupe. Des ordre stricts interdisent d'allumer les torches de la salle.
Malheureusement le frère du Roi, le duc Louis d'Orléans, - arrivé par la suite passablement éméché et surtout ignorant de la consigne - eut le funeste idée d'approcher son flambeau pour voir lequel des ces sauvages était le Roi et il mit malencontreusement le feu à l'un d'eux.
L'incendie se communiqua aux autres...
Par chance le souverain fut sauvé par sa jeune tante, la duchesse de Berry, qui l'enveloppa de son manteau. Quatre de ses gentilshommes déguisés en sauvages enchaînés (seul le Roi n'était pas enchaîné) périrent carbonisés.
Miniature tirée des Chroniques de Jean Froissart
On voit ici le Roi Charles VI s'abritant sous les jupons de sa tante, la duchesse de Berry, qui le sauva ainsi d'une mort certaine.
Miniature tirée des Chroniques de Jean Froissart
Il paraîtrait qu'en fait cette tragédie se passa plutôt à l'Hôtel Saint-Pol, résidence royale de Charles V et de Charles VI, située près du Quai des Célestins.
Croustillant, non ?