Pour terminer cette petite virée en pays de Loire, nous nous sommes arrêtés sur la route du retour à Germigny-des-Prés, petit village rendu célèbre par son église carolingienne renfermant une mosaïque de style byzantin, aussi ancienne que l'église, et unique en France.
Germigny-des-Prés doit son nom à Germinacus, un général romain de l'époque gallo-romaine. Ce dernier a fondé ici une villa gallo-romaine (le mot "villa" désigne une exploitation agricole) qui va échoir par voie d’héritage et par rachat à l’abbaye de Fleury à Saint-Benoit-sur-Loire, voisine.
C'est l'un de ses abbés, Théodulphe, également évêque d'Orléans, chargé par Charlemagne de réformer le système scolaire, qui fit construire l'oratoire - c'est-à-dire une chapelle privée - au tout début du IXe siècle. Il venait en effet régulièrement se reposer à la villa.
A l'origine, l'oratoire avait la forme d'une croix grecque puis, au fil des années, il a pris la forme caractéristique des églises d'aujourd'hui, la croix latine.
L'oratoire est cerné de tamaris.
Nous avons fait tout d'abord le tour de l'église.
Au-dessus de la porte d'entrée latérale, une inscription en latin : grâce à mes lointains souvenirs de terminale et un petit peu grâce à Google traduction, j'ai réussi à en trouver la traduction. Ça vaut ce que ça vaut !
"Moi Théodolphe, j'ai consacré ce temple à Dieu, et chaque fois que tu y vas, je te prie, souviens-toi de Dieu."
C'est tout au bout, dans l'abside, que se trouve la fameuse mosaïque d'époque carolingienne. Au passage, on peut voir des lustres qui habillent le plafond. Ils sont une création des "Ateliers Loire Chartres" (2003) et évoquent par leur forme les couronnes royales carolingiennes.
J'ai remarqué l'élégance des bancs de l'église, qui sont modernes bien sûr.
L'entrée de l'abside est barrée par une corde afin de protéger la Piéta qui y est exposée.
Celle-ci date du XVIe siècle et est en bois de chêne. Fabriquée dans un atelier de sculptures bourguignon, elle représente la Vierge éplorée tenant le corps de son fils à la descente de croix.
On raconte que ce sont des enfants du village qui ont permis de retrouver la mosaïque en cul-de-four qui orne le plafond de l'abside. Ils jouaient avec des "cubes de verre" trouvés dans l’église. Imaginez la surprise des archéologues lorsque, au XIXe siècle, sous le badigeon, ils ont mis à jour une mosaïque datant de dix siècles... Celle-ci avait, en effet, été recouverte en 1792 d’un badigeon pour éviter les pillages. De mauvaise qualité, celui-ci s’est effrité avec le temps et des tesselles sont tombées. L’église est alors classée, restaurée, reconstruite en partie : c’est l’une des plus anciennes de France.
La mosaïque représente l'Arche d'alliance (le coffre contenant les Tables de la Loi transmises à Moïse). Cette dernière est surmontée de deux chérubins et est encadrée de deux archanges entre lesquels apparaît la main de Dieu.
130.000 tesselles composent cette mosaïque d’inspiration byzantine : des cailloux de la Loire, des morceaux de céramique antique, des tesselles en verre teinté ou recouvertes d’une feuille d’or. Théodulphe refusait les images de Dieu, du Christ, de la Vierge et des Saints. Il souhaitait ne pas les représenter sous forme humaine pour ne pas favoriser l’idolâtrie. Pour montrer la présence de Dieu, il a donc choisi la représentation de l’Arche d’alliance (ces renseignements proviennent de Justine Prely, jeune guide conférencière à l’office de tourisme du Val de Sully).
Sous la mosaïque se trouve une inscription : “Vois ici et contemple le saint oracle et ses chérubins : Ici resplendit l’arche du testament divin. Devant ce spectacle, efforce-toi de toucher par tes prières le maître du tonnerre, Et ne manque pas, je t’en prie, d’associer Théodulphe à tes vœux.”
L'arche et les chérubins qui en ornent le couvercle
Détail de l'un des deux archanges
Une inscription en haut d'un pilier à droite du chœur stipule que l'église a été consacrée le troisième jour des nones de janvier 806. L'inscription sur le pilier de gauche est un faux fabriqué en 1847 lors des premières restaurations de l'église.
On voit bien sur cette photo l'éclairage donné par la tour-lanterne située au centre de la croix grecque.
Au fait, je pense que j'ai photographié le faux !
Dans une absidiole latérale, une statue de Sainte-Anne, la mère de Marie, datant du début du XVe siècle.
Mais quelle idée de toujours mettre les œuvres d'art rare en contre-jour au lieu de les éclairer par une petite lampe !
C'est fini pour la visite de l'oratoire.
Joli, tout de même, non ?