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Pour voir le post consacré à la visite de la Cathédrale de Sens, cliquez ICI.
Nous quittons Sens après avoir eu un petit aperçu de cette ville que je ne connaissais pas et qui se révèle riche de son passé et retrouvons la campagne bourguignonne où les agriculteurs s'apprêtent à faire les moissons.
Du département de l'Yonne, nous passons dans celui de l'Aube.
Joli ciel, non ?
J'ai choisi de passer par Ervy-le-Châtel en consultant le site de l'Office de Tourisme qui en parle comme d'une petite Cité de Caractère champenoise.
Nous y entrons par la Porte Saint Nicolas : celle-ci a été construite au XVIe siècle et porte son nom du fait d'une petite statuette située en hauteur au centre de la porte. C'est la seule porte médiévale restant dans l'Aube.
Ils étaient trois petits enfants qui s'en allaient glaner aux champs...
La deuxième chose à voir dans cette petite ville, c'est la Maison du Vitrail d'Armance. Celle-ci a été aménagée dans l’ancienne prison construite en 1833. Sur deux étages, le visiteur découvre de manière ludique la réalisation d’un vitrail, du donateur à son installation sur le chantier. Au deuxième étage, sont projetés des films sur le métier de maître-verrier ainsi que sur les églises du Pays d’Armance et d’Ervy-le-Châtel.
Nous avons la chance de nous joindre à une visite guidée pour la modique somme de cinq euros si mes souvenirs sont bons.
Je vous passe les détails mais nous avons eu droit à toutes les explications voulues sur la fabrication des vitraux depuis leur conception jusqu'à leur exécution. En outre, des panneaux explicatifs permettaient de se repérer et certains d'entre eux sont même destinés à la jeune classe.
Il y a en ce moment à la Maison du Vitrail une exposition de Sophie Berecz.
Voici sa version du célèbre tableau de Manet, Le Déjeuner sur l'herbe.
Ici, un couple de danseurs
Le guide nous a ensuite accompagnés à la Halle circulaire voisine qu'il a ouvert tout exprès pour nous.
Celle-ci date du début du XIXe siècle et est constituée de trois étages à pans de bois, de tailles différentes, avec une galerie à colombages et trois toits de bois.
Elle repose sur les anciennes douves de la ville fortifiée. Autrefois, cet édifice a abrité la Mairie, le Tribunal de District entre 1790 et 1800 et de Justice de Paix jusqu'en 1960.
L'étage inférieur est composé de torchis et les deux étages supérieurs sont en briques et pans de bois. Tout autour de la rotonde une galerie ouverte supportée par vingt colonnes de bois à socle de pierre, servaient d'abri aux éventaires des marchands. Le toit est recouvert de feuilles de zinc pour éviter la surcharge pondérale.
Au rez-de-chaussée, nous découvrons un plafond de châtaignier suspendu, fermé sur une importante clé sur pendentif central.
Le premier étage est constitué par un espace qui permet aux artistes régionaux d'exposer leurs œuvres.
Voici justement un vitrail : il s'intitule L'homme au nuage (2023).
Charles Forzinetti, son créateur, dénonce les procédés modernes qui consistent à s'approprier les nuages et l'eau qu'ils contiennent, en faisant pleuvoir artificiellement.
Au sortir de la halle, nous rejoignons l'église Saint-Pierre-ès-Liens.
Au passage, quelques enseignes, en vitrail naturellement !
L'Office de Tourisme se trouve justement au rez-de-chaussée de la halle.
Il existe un parcours des enseignes mais nous n'aurons pas le temps de le faire. Ce sera pour une prochaine fois !
L'église est construite au XVe siècle et en partie détruite en 1433 pendant la guerre de Cent Ans : elle est reconstruite à la fin du XVe siècle et au début du XVIe siècle. C'est un mélange des styles gothique, pré-Renaissance et Renaissance.
La rue Saint-Pierre qui la borde est tellement étroite qu'elle est très difficile à photographier.
Sa statuaire en fait un véritable musée de l'Ecole Champenoise du XVIe siècle.
On ne sait plus où donner de la tête !
L'autre originalité de l'église Saint-Pierre est la qualité de ses vitraux.
Certains thèmes iconographiques traités sont particulièrement originaux, comme cette verrière de 1502, unique en France, inspirée des Triomphes du poète italien Pétrarque (1304-1374).
La lancette de droite, accueille une belle composition florale de 2020, œuvre du peintre verrier Flavie Serrière Vincent-Petit.
L'artiste a aussi réalisé les vitraux non narratifs modernes.
J'avoue que j'ai eu le coup de foudre pour ces derniers !
Une petite ville de seulement 1200 habitants mais qui vaut le détour.
Ainsi se termine notre escapade entre sœurs : elle s'est très bien passée. Hôtel, restaurant matin midi et soir, de belles visites, une campagne magnifique : les vraies vacances quoi !
A refaire l'an prochain
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Pour regarder l'épisode précédent (Découverte de Sens), cliquez ICI.
Nous voici donc en plein centre de Sens. Rappelez-vous : hier nous avons dîné au pied de la Cathédrale Saint-Etienne que nous allons maintenant visiter.
Si nous voulons en faire le tour par l'extérieur, il faut prendre l'entrée des musées de la ville donnant accès à la cour du Palais Synodal.
Vue sur la tour Sud et la rosace du transept Sud, une œuvre de Martin Chambiges.
Les tuiles vernissées, une spécialité bourguignonne !
Ici, celles du Palais synodal. Celui-ci a servi de résidence aux évêques jusqu’en 1905. Au XIXe siècle il a fait l’objet de restaurations par Eugène Viollet-le-Duc qui a recréé sa toiture polychrome dans la plus pure tradition bourguignonne.
En ressortant, la vue donne sur le Marché couvert de Sens.
La Cathédrale est enserrée dans des maisons du côté du transept Nord.
On tourne, on tourne pour admirer le chevet de l'église.
Le Palais archiépiscopal abrite le musée archéologique de la ville.
En prenant la rue des Déportés pour rejoindre l'entrée de la Cathédrale, nous longeons sa façade richement sculptée.
Je n'ai pas trouvé la signification de ces têtes de Maure... ?
L'entrée Renaissance du passage de Moïse donne accès aux musées de la ville.
Le tour de la Cathédrale terminé, il nous reste à en visiter l'intérieur.
Pour entrer, nous prenons le Portail Saint Jean-Baptiste : situé côté Nord de la Cathédrale, c'est le plus ancien des trois portails de la façade. Il remonte à la décennie 1190-1200 et est le seul à conserver presque entièrement sa sculpture originelle même si les têtes de tous ses personnages ont été mutilés en 1793.
La vie de saint Jean-Baptiste s'étale dans le tympan et les voussures dont la plupart des sculptures se termine par un élégant dais.
Le tympan illustre trois scènes de la vie du Christ: son baptême ; le festin d'Hérode, avec Salomé apportant la tête du saint sur un plateau ; la décollation de Jean-Baptiste.
Imaginez-vous que vous êtes dans la première cathédrale gothique construite en France et même dans le monde ! Je l'ai appris il y a plusieurs années en lisant le roman écrit par Jean Diwo, "Le printemps des cathédrales", un livre qui m'avait passionnée, que je vais sûrement relire et que je vous conseille : il retrace la construction des cathédrales gothiques à travers l'histoire d'une famille d'architectes et de tailleurs de pierre et il fourmille de détails sur la vie au Moyen-Age.
Une bien jolie grille pour cette chapelle latérale modifiée au XIXe siècle par Adolphe Lance, architecte du gouvernement (il détruisit les chapelles romanes dans la lignée de Viollet-le-Duc, ce qui ne plut pas à tout le monde...).
Le Mausolée des Davy-du-Perron est dédié au cardinal Jacques du Perron (décédé en 1618), ami du roi Henri IV, et à son frère Jean, qui lui succéda comme archevêque de Sens. Il a été mis en place dans la Cathédrale en 1637.
En haut du Mausolée, les deux frères agenouillés ; en bas deux enfants pleureurs.
Jacques ou Jean... ?
Trop mignon !
Le Jugement dernier et la vie de Saint-Etienne racontés dans la rose du transept Sud.
Pour m'informer sur la signification des vitraux, j'ai l'habitude d'aller sur "patrimoine-histoire.fr" : on y trouve tout sur les monuments historiques. Je compare mes photos aux leurs et le tour est joué !
Détail montrant le démon rouge qui surveille les damnés plongés dans le chaudron et les morts qui sortent de leur tombeau
La Cour Céleste avec saint Étienne en tête et saint Jean-Baptiste reconnaissable à sa tunique couverte de poils de chameau.
Une superbe grille en fer forgé dorée à l'or fin donne accès au déambulatoire Nord.
J'ai remarqué une statue romane encadrée par deux jolies colonnes : elle provient de la maison habitée à Sens par Thomas Becket et il est possible qu'elle représente Saint Thomas.
Une porte en bois agrémentée de superbes ferrures et encadrée par de beaux chapiteaux, ça mérite la photo.
Dans le chœur, le baldaquin dessiné par le grand architecte franco-italien Giovanni Niccolo Servandoni et exécuté en 1742 par les frères Stodtz
Il est inspiré de celui de Saint-Pierre de Rome et est porté par quatre colonnes de marbre provenant de la place des Victoires à Paris.
Le déambulatoire Nord et son arcature romane du XIIe siècle nous offre à voir de très beaux chapiteaux.
Celui-ci représente la taille de la vigne.
Ces animaux monstrueux sont-ils destinés à faire peur aux croyants infidèles ? Je ne me prononcerai pas.
De place en place, ces arcatures romanes sont entrecoupées par des chapelles.
Ainsi la Chapelle Sainte-Colombe qui abrite un monument ayant miraculeusement échappé aux révolutionnaires. Il s'agit du tombeau du Dauphin et de la Dauphine, père et mère de Louis XVI, dont les dépouilles reposent toujours dans le chœur de la Cathédrale. L'œuvre, de Guillaume Coustou le Jeune, a été terminée en 1777.
La grille étant fermée, on ne peut voir que de loin les trois grandes statues représentant l'Immortalité et la Religion d'un côté, l'Amour conjugal de l'autre. Dommage qu'on ne puisse pas en faire le tour...
Dans la Chapelle Saint-Savinien, l'une des chapelles primitives du XIIe siècle remaniée au XIIIe siècle se trouve une sculpture monumentale datant de 1777 représentant le martyre de Saint Savinien, premier évêque de Sens.
Cette œuvre, d'une grande tension, est installée sur l'autel en 1772. Malheureusement, le sculpteur a jugé bon de l'envelopper dans une haute draperie en stuc. On voit, sur la photo, qu'elle cache le bas de la verrière composite qui se trouve derrière et qui rassemble des fragments de vitraux des XIIe et XIIIe siècles.
Devant un tribunal romain, Savinien, premier évêque de Sens, ayant proclamé sa foi envers et contre tout, sait que, avec ses compagnons, il est condamné à mourir. S'étant retiré dans une crypte pour y prier, les cruels licteurs souffrant impatiemment ce retard, se précipitent dans cette crypte et le frappent de l'épée et de la hache de deux coups sur le sommet de la tête le tuant.
La sculpture de Joseph Hermand respecte les grandes lignes de ce meurtre. Un soldat s'apprête à frapper Savinien de sa hache tandis qu'un autre le saisit à la gorge.
Je continue ma série de chapiteaux du XIIe siècle avec celui-ci très élégant.
Une sirène et un sirène !
Ayant fini de "déambuler", je retrouve de l'autre côté du chœur le baldaquin du maître-autel décidément bien difficile à photographier.
Cet élégant escalier conduit au Trésor de la Cathédrale. Au-dessus, un tableau représente l'Assomption de la Vierge par Nicola Restout (1741).
L'une des trois chapelles primitives du XIIe siècle, reconstruite entre 1295 et 1320.
Elle contient une magnifique Vierge à l'Enfant du XIVe siècle.
Cliquez sur l'image pour la voir en grand...
Je sors maintenant de l'espace "chœur" en franchissant à nouveau une très belle grille en fer forgé.
Voici le transept Nord : dans la rose, le Concert Céleste avec son cortège d'anges musiciens. Des instruments du Moyen-Age, aujourd'hui disparus, y côtoient des instruments annonçant la période baroque : la viole de gambe, la saqueboute (instrument à vent ancêtre de notre trombone à coulisse), sans oublier les premiers clavecins.
Vous ne voyez rien ? C'est normal mais ça va s'arranger !
Cliquez, ce n'en sera que mieux...
Et voici la superbe grille qui clôt le chœur : dessinée par Michel-Ange Slodtz, ses nombreux motifs à la feuille d'or représentent des objets liturgiques. Elle est l'œuvre de Guillaume Doré.
L'orgue de tribune date de 1734 et a été restauré en 1890. Charles Gounod a eu l'occasion d'y jouer.
C'est par là qu'on sonne les cloches !
Allez, un dernier vitrail pour la route ! Celui de Saint Eutrope : il date de 1530 et est attribué, sans certitude, à Jean Cousin père.
L'histoire de saint Eutrope, contemporain du Christ, est bien sûr légendaire. Fils du roi de Babylone, il visite Hérode et sa cour. Entendant parler de Jésus, il part à sa rencontre, le trouve au moment de la Multiplication des pains. Plus tard, il reviendra et le verra au moment de son entrée triomphale à Jérusalem. Il sera présenté au Christ par l'apôtre Jude. Ses parents et lui seront convertis à la foi chrétienne. Puis Eutrope se rend à Rome où Pierre le charge d'évangéliser la Gaule. À Saintes, il subit un échec. Il revient avec le titre d'évêque, envoyé par le successeur de Pierre, le pape Clément, et vit en ermite. Il prêche et convertit Estelle, fille d'un roi local. Celui-ci, furieux, fait assassiner Eutrope par les bouchers de la ville. Estelle veille à son ensevelissement. Le lieu en sera sa cabane d'ermite, là où l'on édifiera plus tard une basilique et où se produiront de nombreux miracles.
Dans la rose du tympan, les quatre évangélistes entourent le Christ.
Le registre inférieur retrace la vie d'Eutrope.
1) Le Baptême d'Eutrope ; 2) Le pape Clément sacre Eutrope évêque de Saintes ;
3) Eutrope prêche à Saintes et convertit Estelle, fille d'un roi local ; 4) Le Martyre de saint Eutrope, tué par les bouchers de la ville sur ordre du roi.Cliquez sur l'image !
Notre visite de la Cathédrale se termine mais vous n'avez vu ici qu'une infime partie de tous ses trésors.
Une belle découverte !
La fin de cette escapade entre soeurs (la visite d'ervy-le-Châtel), c'est ICI.
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Pour regarder l'épisode précédent (Visite de La Ferté-Loupière et de Villeneuve-sur-Yonne), cliquez ICI.
Quittant Villeneuve, nous rejoignons Sens où j'ai réservé un hôtel trois étoiles pour terminer en beauté cette petite virée : il s'agit d'une chaîne appelée "The originals".
Ayant réservé deux chambres "single", nous apprenons à l'accueil que l'Hôtel les a changées contre des chambres "double" pour le même prix : ça commence très bien !
Un petit coin salon
Des chambres qui donnent sur le jardin de l'hôtel.
Aussitôt installées, nous partons en direction du centre ville.
Notre premier arrêt est pour la "maison d'Abraham". J'ai lu qu'elle avait inspiré Gustave Flaubert pour son roman L'Éducation sentimentale.
Cette maison à colombage du XVIe siècle, construite pour le tanneur Nicolas Mégissier, est l'une des plus anciennes et des plus célèbres de Sens. Elle est aussi appelée la "maison des Quatre Vents", sans doute à cause de sa position en angle de rue. Un arbre de Jessé sculpté sur le poteau cornier, représente la Vierge et huit rois d'Israël. La dénomination maison d'Abraham semble provenir d'une erreur populaire faisant remonter l'arbre de Jessé jusqu'à Abraham.
Tout en bas, il y a Jessé, le père du roi David : de son flanc sort l'arbre dont les branches portent les ancêtres du Christ.
Et là, il y a quatre des huit rois d'Israël (j'ai eu la bêtise de ne photographier qu'un côté de l'angle composant l'arbre). Tout la haut, la Vierge et l'enfant Jésus.
La maison possède un joli décor de porte.
Serait-ce le propriétaire de la maison représenté en haut à gauche de la porte (et en face, sa femme)... ? J'aime bien faire des suppositions !
Voisine de la maison d'Abraham, la maison du Portail (ou maison du Pilier) qui date elle aussi du XVIe siècle.
Ce passage conduisait communiquait autrefois avec la place du marché aux porcs.
Les maisons à pans de bois sont légion à Sens.
Voici la "maison Jean Cousin" : ce dernier n’a probablement jamais habité cette belle demeure du XVIe siècle qui porte pourtant son nom.
Quels sont ces animaux fantastiques, gardiens de la porte... ?
Il semblerait que la maison ait appartenu à l’un des propriétaires du fameux tableau exposé au Louvre – Eva Prima Pandora – peint par l’artiste sénonais Jean Cousin l'Ancien en 1550. Il s'agit peut-être du premier nu de l'histoire de la peinture française qui s'inscrit dans la naissance et le développement dans la deuxième moitié du XVIe siècle du maniérisme français autour de l'Ecole de Fontainebleau.
Outre la façade sculptée donnant sur la rue Jean-Cousin, la maison éponyme est agrémentée d’un remarquable escalier extérieur à vis – visible de la rue Jossey.
Ce portail est celui de l'Hôtel particulier de Bourrienne.
C'était la "maison des Fauvelet", comtes de Charbonnières de Bourrienne, une famille du patriciat local. Luis Antoine Fauvelet de Bourrienne, diplomate, député, Ministre d'État et secrétaire particulier de l'Empereur Napoléon Ier, y est né et l'Empereur y a séjourné lorsqu'il était Premier Consul. Le sculpteur David d'Angers y a également séjourné et l'Hôtel fut le siège de l'Archevêché de Sens au début du XXe siècle entre 1905 et 1929.
En haut du portail, le blason des Bourrienne
L'Hôtel particulier de Bourrienne a été la demeure de Marivaux dont l'épouse était sénonaise.
Une plaque sur cette jolie maison à pans de bois du XVIe siècle, évoque l’ancien "Hostel du compasseur". Ce terme remonte au XIIe siècle, temps des cathédrales. Il désignait celui qui traçait, à l’aide d’un compas, les éléments d’architecture sur les pierres.
Une autre plaque vue sur de nombreuses maisons sénonaises m'a intriguée : "Censive de". J'en ai trouvé l'explication en consultant mon ami internet qui, comme vous le savez, sait tout !
Le "cens" était un impôt que devait payer chaque année le propriétaire d'un vigne ou d'une maison construite sur le terrain nu d'un propriétaire religieux ou noble. La censive était immuable, non réévaluée mais, rassurez-vous, elle a été abolie à la révolution et est maintenant remplacée par... l'impôt foncier (qui lui a le désavantage de ne pas rester immuable) !
Plusieurs maisons pouvaient ainsi être "étiquetées" Censive telle celle-ci : "Censive de Sainte-Colombe du Carrouge" située non loin de la précédente.
Celle-ci est la "Censive des chanoines de Saint-Jean", construite à la même époque.
Avouez qu'elles ne font pas leur âge, ces maisons à pans de bois !
Nous voici arrivées au centre de la ville avec ici la Halle aux fleurs et au fond la Cathédrale.
Cette maison était autrefois "L'auberge de la Pointe" : elle date du XVIe siècle.
La voici de nos jours et a gardé ses superbes balcons de pierre ornés d'une balustrade en fer forgé.
Sur son mur pignon, la date de 1537 et une inscription : "Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de toute ton âme, de tout ton cœur et de toute ta force et entendement et ton prochain comme toi-même."
L'autre inscription, en latin, m'a échappé car depuis le temps..., j'ai perdu mon latin !
Nous voici au cœur de la ville : d'un côté, le Marché couvert,
et de l'autre la Cathédrale Saint-Etienne dont la façade est éclairée par le soleil couchant.
Ce restaurant fera l'affaire sauf qu'en terrasse le vent souffle trop fort : nous dînerons à l'intérieur.
Le portail principal de la Cathédrale Saint-Etienne a été en partie mutilé comme tous les autres en 1993 excepté le trumeau où se trouve le diacre Saint-Etienne car un patriote l'avait coiffé d'un bonnet phrygien.
La sculpture date des environs de 1200. Saint-Etienne tient le livre des évangiles.
Les deux médaillons au-dessus de l'archivolte symbolisent la Cité céleste, autrement dit Jérusalem.
Le tympan a été réalisé dans les années 1230-1240. Il épouse le fenestrage d'un vitrail. Il illustre des scènes de la vie d'Étienne, premier diacre de l'Église.
Sur la route du retour à l'hôtel, une maison attire mon attention par les sculptures qui ornent ses fenêtres.
Elle représente des ouvriers du bâtiment qui travaillent sous la direction d'un architecte. A droite, on aperçoit le Marché couvert.
Le maçon monte les murs.
Ici, peut-être le charpentier voisin de la Cathédrale.
Ici, je reconnais le couvreur,
Là, le ferronnier,
Enfin, la touche finale avec le tailleur de pierres.
Etonnamment, je n'ai absolument rien trouvé sur le net.
Retour à l'hôtel pour retrouver nos chambres : un grand lit, la clim, une télévision, un petit bureau et une salle d'eau, tout est parfait.
Après un bon petit-déjeuner, nous reprenons la direction du centre ville.
Avant de le rejoindre, un petit tour sur les bords de l'Yonne voisine de l'hôtel.
Sur l'île d'Yonne, l'église Saint-Maurice se reflète dans l'eau.
Quel est ce grand chef qui va nous guider... ? Je penche pour Vercingétorix.
Le Laurencin est un ancien Hôtel particulier qui abrite maintenant 15 appartements de luxe à la location de courte durée. C'était autrefois la Maison Municipale.
Tiens tiens, un petit air de déjà vu mais j'ai encore craqué devant l'arrondi des balcons !
Et à nouveau la "Censive des chanoines de Saint-Jean"... Nous approchons de la Cathédrale.
Sens, c'est fini...
Pour regarder le post suivant sur la Cathédrale, cliquez ICI.
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Pour voir l'épisode précédent : la Danse macabre de La Ferté-Loupière, cliquez ICI.
Nous continuons notre escapade sur les routes de Bourgogne et arrivons à Villeneuve-sur-Yonne dont l'histoire est celle d’un attachement à la couronne de France.
C’est à Louis VII (l’arrière-grand-père de Saint-Louis) que les Villeneuviens doivent la fondation de leur ville en 1163. Elle s’appelait alors Villeneuve-le-Roi (jusqu'à la Révolution) et avait été conçue comme un avant-poste de sa grande sœur Sens et du royaume de France face au puissant Comté de Champagne.
Nous entrons dans la petite ville de 5000 habitants par l'élégante Porte de Sens située au nord de la ville sur laquelle s'adossait autrefois (entre le XIIIe siècle et le XVIIe siècle) une épaisse muraille longue de deux kilomètres et de dix mètres de hauteur aujourd'hui disparue.
Vue de la Porte de Sens depuis l'intérieur de la vieille ville
On aperçoit à gauche de la photo le départ de l'épaisse courtine (muraille) aujourd'hui détruite qui était surmontée d'un chemin de ronde couvert d'une charpente de tuiles auquel on accédait par l'escalier de pierre que l'on peut encore gravir de nos jours.
Evidemment, en bonne biquette que je suis, j'y suis montée : lol !
L'ancienne courtine a laissé place à des maisons de ville.
Depuis la galerie, on a une jolie vue sur l'Hôtel de Ville voisin.
Sur la la place Georges Clémenceau faisant face à la Mairie, un buste rend hommage à l'homme politique, président du Conseil et ministre de la guerre durant la Première Guerre mondiale.
Tout comme à Auxerre et à Joigny, ici encore des plots cuivrés fixés sur la chaussée indiquent le chemin à suivre pour visiter la ville.
Il y a d'abord, dans la rue principale menant à la deuxième porte de la ville, la Maison des Sept Têtes qui tire son nom des mascarons qui en ornent la façade représentant des divinités romaines.
Au premier étage, on trouve ainsi de gauche à droite :
Neptune, maître des flots, qui rappelle l’importance du commerce de rivière pour l’approvisionnement de Paris,
Flore qui représente la production forestière,
Cérès, elle, s'occupe de la vocation agricole de la vallée,
et Bacchus le vignoble qui, depuis le XIIIe siècle, couvrait les coteaux,
Toutes productions qui du XVe au XIXe siècle ont fait la prospérité de la ville et de son commerce vers la capitale.
Quant à Mercure, le dieu du commerce, pourquoi est-il représenté avec ces protubérances dans le menton... ? Je n'ai pas trouvé.
Un peu plus loin, au N°56 de la rue Carnot, une maison devenue tristement célèbre, celle du docteur Petiot, que ce dernier habita entre 1922 et 1933 : en 1946, Marcel Petiot est condamné pour meurtres (puis guillotiné) après la découverte à son domicile parisien des restes de vingt-sept personnes. Une personnalité plus que curieuse dont vous pourrez lire l'histoire ICI (source Wikipédia).
La fontaine Briard (du nom de ses donateurs, descendants de tanneurs) a été sculptée par Emile Peynot (1850-1902).
La jeune femme qui la surmonte constitue une allégorie de la ville et rappelle les activités traditionnelles de Villeneuve, quand du XVe au XIXe siècle la ville constitua l’un des ports sur l’Yonne pour l’approvisionnement de Paris en vin, en bois, en charbon de bois, puis en briques et en tuiles…
Voisine de la fontaine, l'église Notre-Dame-de-l'Assomption
Nous n'y rentrerons pas, Arlette n'étant pas inspirée par sa façade Renaissance. Dommage, car j'ai vu qu'elle contenait une belle mise au tombeau...
Nous voici déjà arrivées à la Porte de Joigny, la deuxième porte encore existante de la ville qui en possédait cinq à l'origine.
L'Office de Tourisme de la ville, voisin de la porte, abrite le Musée-Galerie Carnot dont la visite est à notre programme...
La conservatrice du musée nous propose gentiment de nous accompagner dans notre visite et nous montre deux tableaux peints par le peintre Francis Picabia (1879-1953) qui a visiblement été inspiré par le pont de Villeneuve-sur-Yonne.
Le pont de Villeneuve avec effet de lumière (1906)
Le pont de Villeneuve avec effet de neige (1907)
Nous continuons par la section concernant Emile Peynot, sculpteur et médailleur français né à Villeneuve en 1850 et décédé à Paris en 1932. Il a été grand prix de Rome en 1880 et a exécuté nombre de monuments dans différentes villes françaises, à Paris et même à Buenos-Aires.
Ainsi, une statue de La Renommée couronne le dôme du Petit Palais à Paris.
Tandis qu'à Buenos-Aires, il a exécuté un monument très imposant commémorant le centenaire de la révolution de Mai.
Mais revenons à notre musée...
Dans la pièce qui lui est consacrée, quelques œuvres ont retenu mon attention : le buste de Victor Duflot (voir ci-dessous) et une peinture représentant Théodore Balké, peintre orientaliste qui fut son ami.
Victor Duflot fut son instituteur : ayant lui-même appris le dessin et l'aquarelle, il encouragea son élève à s'engager dans la voie des Beaux-Arts.
Une tête intéressante, je trouve.
Le coin bibliothèque où se trouvent les médailles et les décorations de l'artiste.
La Porteuse de gerbes ou L'Angelus - bronze
Buste de Marie L. (un amour de jeunesse si mes souvenirs sont bons) - 1889 - terre cuite
Au final, dans le musée rien de bien extraordinaire puisque l'artiste a surtout sculpté de grandes œuvres. Il a tout de même fait le monument aux morts de la ville surmonté d'un superbe coq.
Nous ressortons de la vieille ville par la Porte de Joigny pour aller flâner sur les bords de l'Yonne voisine.
La tour Bonneville, l'une des tours de défense remaniée au XIXe siècle, est actuellement une chambre d'hôtes.
Et voici le Pont Saint-Nicolas peint par Picabia : datant du XIIe siècle et long de 210 m, il possède 10 arches réparties de part et d'autre de "l'Ile d'Amour".
Au centre du pont, la croix de Saint-Nicolas, patron des mariniers.
Nous voici justement sur cette île.
Joli, non ?
A droite, on aperçoit l'église Notre-Dame-de-l'Assomption dont la tour est échafaudée.
Avant de quitter la ville, un passage par le Donjon ou Tour Louis le Gros : en 1205, Philippe Auguste passe commande d’une tour, elle sera achevée en 1212. Séparé des remparts, le donjon est le signe de la puissance royale, protectrice d’une ville largement autonome.
Une petite ville pleine de charme qui mérite le détour.
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Pour regarder le post précédent (la visite de Joigny), cliquez ICI.
Nous continuons notre périple bourguignon en nous arrêtant à La Ferté-Loupière pour y visiter l'église Saint-Germain. Ce petit village se trouve à une trentaine de kilomètres au nord-ouest d'Auxerre.
Vous allez me dire "On en a assez de tes églises." et vous n'aurez pas tout à fait tort. C'est vrai qu'entre Auxerre et Joigny, nous en avons visité de nombreuses ! Mais la France a un passé religieux si riche depuis des siècles que, même si je suis agnostique, je n'en admire pas moins les trésors qu'elle nous a laissés.
J'ai mis l'église Saint-Germain à notre programme car elle abrite l'une des rares Danses macabres existant en France. De plus, celle-ci (découverte en 1910), est en excellent état, ceci étant dû au badigeon qui l'a recouvert pendant plusieurs siècles.
La Danse macabre s'étend sur 25 mètres de long : ici, l'église côté chœur
et côté porche
Il s'agit de peintures réalisées sur enduit sec et non de fresques. La Danse macabre est associée à trois autres scènes : le Dit (ou Dict) des trois morts et des trois vifs, l'archange Saint-Michel terrassant le démon et la Vierge de l'Annonciation.
Le Dit des trois morts et des trois vifs
Cette représentation murale montre trois beaux jeunes chevaliers (un duc, un comte et un fils de roi) qui rencontrent, lors d'une partie de chasse, devant un cimetière, trois morts réduits à l'état de squelettes qui, dans une perspective morale, attirent leur attention en leur rappelant la brièveté de la vie et l'importance du salut de leur âme.
Ce récit apparaît dans la littérature dès la fin du XIIIe siècle.
Un cheval se cabre, un autre tourne déjà bride, tandis que l'un des faucons s'envole et qu'un autre se pose sur la croix. Un chien aboie. Le premier mort brandit un dard et s'appuie sur un pic de fossoyeur.
Cliquez sur l'image pour l'agrandir : c'est vraiment superbe !
Voici maintenant l'archange Saint-Michel terrassant le démon
Et enfin la Vierge de l'Annonciation
La Danse macabre quant à elle est composée de 42 personnages, parmi lesquels figurent les puissants de ce monde (laïques et religieux), mais aussi les gens du commun, à la rencontre desquels viennent des squelettes pour leur rappeler leur fin inéluctable dans une danse pleine d'ironie. Ce genre de scène prend naissance dans des représentations théâtrales appelées mystères.
La Danse macabre ne manque d'humour ni surtout d'impertinence.
D'ailleurs, c'est sous la pression ecclésiastique qu'elle avait été recouverte d'un badigeon à La Ferté-Loupière. Et c'est fort heureux, car ce dernier a permis de la conserver. Cette Danse macabre est précieuse également pour les historiens, qui y voient un témoignage sur les coutumes vestimentaires à la fin du XVe et au début du XVIe siècle (on ignore la date exacte de cette oeuvre néanmoins d'inspiration médiévale).
L'acteur, assis, précède le défilé de couples mort/vif qu'il enregistre sur un parchemin devant trois squelettes musiciens (le joueur de cornemuse, le joueur d'orgue portatif et le harpiste). Le pape ouvre le cortège des vivants escortés par la mort, religieux et laïcs représentant toute la hiérarchie sociale. La mort est universelle et inévitable ; elle est imprévisible et rétablit l'égalité entre les hommes.
Puis viennent le roi, le légat, le duc et le patriarche.
Suivis par l'archevêque, le connétable, l'évêque, l'amoureux, et l'avocat.
L'amoureux tient dans sa main droite une tulipe noire alors qu'à cette époque la tulipe n'existait pas encore en France : c'est donc un mystère. L'hypothèse est que, dans cette peinture, tout n'ait pas été fait à la même époque et qu'il y ait eu des retouches au cours des siècles.
Le ménestrel, le curé, le laboureur, le cordelier, l'enfant, le clerc et l'ermite closent cette superbe peinture murale.
Regardez la Danse macabre en linéaire et en musique (de Saint-Saens évidemment)...
C'est LE fléau, la grande peste noire de 1347 qui touche toute l'Europe du Nord, qui est à l'origine des représentations de Danses macabres. Un historien, Froissard, nous apprend qu'un tiers de l'Europe mourut (25 millions de morts en deux ans). Les guerres (en particulier la guerre de Cent ans) n'apportent que misère, la disette s'installe à cause de l'insécurité des transports... La Danse macabre est née en France, semble-t-il, à la suite de toutes ces misères. Elle connaîtra rapidement un essor retentissant partout en Europe pendant plus de deux siècles.
Dans l'église, beaucoup de documentation (je m'en suis servie pour identifier tous les personnages) et en particulier :
l'Ocre et les techniques de peintures murales
depuis l'origine jusqu'à nos jours.L'ocre est une roche ferrique composée d'argile pure (kaolinite) colorée par un pigment minéral ou hydroxyde de fer : l'hématite pour l'ocre rouge, la limonite pour la brune, et la goethite pour la jaune. Cette argile colorée est amalgamée aux grains de sable (quartz) et les ocres se trouvent à l'état naturel dans le sol, sous forme de sable ocreux.
En France, l'ocre se trouve en Bourgogne (en Puisaye), dans les monts du Vaucluse, dans le Colorado provençal ou à Roussillon.
La technique de la peinture murale
Durant tout le Moyen-Age, les peintres utiliseront les mêmes techniques que celles des artistes antiques (peintures romaines) mais ils adapteront et amélioreront en permanence les méthodes et les procédés, en fonction des connaissances acquises au fil des siècles.
Avant l'application de la peinture, on enduisait le mur d'une couche de mortier. Ceci permettait d'obtenir une surface suffisamment rugueuse, idéale pour faire adhérer les couches de peinture. Souvent, une couche de peinture de fond était appliquée : il pouvait s'agir soit d'un simple lait de chaux blanc, soit d'une couche de peinture de couleur ocre ou noire. Puis le peintre déterminait une série de cases sur le mur, une pour chaque "tableau" à représenter.
Enfin, la forme des figures et le contour des personnages étaient réalisés par le peintre en utilisant une peinture de couleur différente du fond, comme le noir ou le brun. Les surfaces ainsi délimités étaient ensuite coloriées. Finalement, les détails comme les ombres ou les jeux de lumière étaient ajoutés.
C'est par cette technique qu'ont été réalisées les peintures murales de la Danse macabre de l'église de La Ferté-Loupière et c'est pourquoi elles ont tant résisté au temps...
En 2009, les peintures de la Danse macabre ont été primées par l’Académie des Beaux-Arts qui a décerné le Grand Prix de la Fondation Prince Louis de Polignac à l’église de La Ferté-Loupière.
L'église, construite à la fin du XIe siècle a été agrandie au XVe siècle par la famille de Courtenay dans un style gothique flamboyant puis à nouveau au XVIIe siècle.
Clic clac, photo Kodak !
Après l'effort intellectuel, le réconfort de l'assiette au Grill Saint-Germain : pas besoin d'aller loin pour bien manger !
Une très belle découverte
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